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Peut-on interrompre le prêcheur pendant la prêche du vendredi

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Date de publication : 02-11-2000

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Question

Question : Est-il permis de se livrer à des perturbations et des interventions pendant l’heure du vendredi? Quelles seraient les justificatives d’un tel comportement ?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Premièrement, il est interdit de parler le vendredi quand l’imam prononce son sermon sur la chaire. Le parleur commet un péché, même si les propos qu’il tient à cette heure impliquaient la mention d’Allah.

La prière du vendredi est un moment de calme et de silence. Le fidèle doit observer une révérence profonde et totale afin de tirer profit du sermon et des connaissances dont le commun des gens a besoin. C’est pourquoi il n’est pas permis de parler, même si c’était pour ordonner le bien et interdire le mal en dépit du fait que ceci représente une des plus grandes obligation et même s’il ne s’agissait que dire :   Taisez-vous  ou Silence !  Et ce compte tenu des preuves que voici .

D’après Abou Hourayra, le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui  ) a dit : Si vous dites à votre voisin : ‘’ taisez-vous’’ au moment où l’imam est en train de prononcer la prêche du vendredi, vous aurez proféré une vaine parole » (rapporté par Boukhari (892) et par Mouslim (851).

Vous voyez -puisse Allah vous accorder sa miséricorde- que même le faite de dire :   Taisez-vous  à votre voisin est considéré comme une vaine parole à interdire pendant l’heure du vendredi. Pourtant cette injonction relève de la recommandation du bien et de l’interdiction du mal.

Mais il y a plus dur! Ecoutez le hadith qui suit : Abou darda dit : «  Le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui  ) s’installa sur la chaire , sermonna les gens et récita un verset. Je dis à Ubay Ibn Ka’ab qui se trouvait à mes côtés. Ubay, depuis quand ce verset a été révélé? Ubay refusa de me répondre malgré mon insistance. Quand le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui ) redescendit, Ubay me dit :  Tu n’aura récolté de ton vendredi que ta vaine parole . Une fois le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui  ) rentré chez lui, j’allai l’informer de ce qui venait de se passer et il dit :   Ubay a raison ; quand ton imam parle, tu dois l’écouter jusqu’à ce qu’il termine  ( rapporté par Ibn Madja ( 1111) et Ahmad , 20780 et vérifié par al-Bouaasyri et Cheikh al -Albani dans Tamam al Minna , p 338.

Si une question posée le vendredi à propos d’ un verset peut priver son auteur de la récompense de la prière, que dire des propos de celui qui ne parle que de son commerce, de son champ et de ses affaires profanes. En outre, certains, par excès d’inadvertance, profitent du temps du sermon pour dormir et rien ne leur fait plaisir à cette heure comme le sommeil!

Pourtant, même la prière pour un éternumentateur et la réponse à un salut sont interdites pendant l’heure du vendredi comme le déclare al-Nawawi dans al-Madjmou. Il dit encore :   L’avis juste soutenu par les textes implique l’interdiction de la prière pour l’auteur d’un éternuement et la réponse à un salut  Tamam al-minna, p.335.

Il en est de même de tous les dhikr, demandes de pardon, formules de glorification d’Allah et d’autres invocations. On ne les prononce pas à haute voix malgré leur caractère de dhikr (rappel d’Allah ) au même titre que le sermon dont le Très Haut dit :  Ô vous qui avez cru! Quand on appelle à la Salâ du jour du Vendredi,accourez à l'invocation d'Allah et laissez tout négoce. Cela est bien meilleur pour vous, si vous saviez! (Coran, 62:9) L’occupation prônée dans ce verset englobe aussi bien la prêche que la prière, toutes les deux impliquent le rappel d’Allah.Or ce rappel, qu’il prenne la forme de dhikr ou d’autres formes, reste une sunna et son temps très vaste. Quant à l’écoute du sermon, elle est obligatoire et son temps est restreint. C’est pourquoi elle est prioritaire par rapport aux autres actes de dévotion.

Le fait de dire ‘Amen’ suite aux prières du prêcher et la prononciation de la prière pour le Prophète quand celui-ci est mentionné dans la prêche doivent être effectuées discrètement par l’auditoire car ils ne doivent pas les laisser entendre.

Deuxièmement, l’interdiction de la parole s’applique pendant que le prêcheur prononce son sermon ; sa seule présence sur la chaire n’implique pas l’interdiction de parler et de rappeler Allah. Car le hadith précédent  précise :   alors que l’imam prononce son sermon  Il limite ainsi l’interdiction au cas ou l’imam est en train de prononcer son sermon.

Quant au hadith qui dit :   Dès que l’imam s’installe sur la chaire, plus de prière, plus de parole  il est apocryphe et sans  fondement.Voir As-silsila adh dhaifa,87.

Troisièmement, des considérations qui autorisent la parole et le geste pendant le sermon de l’imam :

     -Le cas où le prieur éprouve un besoin qu’il ne peut pas refouler comme le sommeil, les besoins naturels ou une douleur qui l’indispose. La preuve en réside dans ce hadith :   Quand l’un de vous somnole dans la mosquée le vendredi, qu’il change de place  (rapporté par Abou Dawoud, 1119 et at-Tarmidhi, 526 et vérifié par Cheikh al-Alabni dans as- silsila as -sahiha, 468. La version d’al-Bayhaqi ajoute :   pendant que l’imam prononce son sermon  Ce qu’al Albani a également reconnu authentique.

- Il est autorisé à faire ce qui lui est permis dans la prière comme le fait de diriger un aveugle pour éviter qu’il ne tombe. Il en est de même des autres urgences de la vie qui pourraient occasionner la perdition ou la privation d’un grand intérêt. Aussi est-il permis aux prieurs de demander à l’imam d’implorer la pluie pour eux. A ce propos, Anas Ibn Malick dit qu’un homme entra dans la mosquée à partir d’une porte alors située près de la Maison de justice à un moment où le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui ) était debout en train de prononcer le sermon du vendredi. L’homme s’adressa au Messager d’Allah en ces termes :   Messager d’Allah, des biens sont détruits et des chemins coupés; demande  à Allah de nous secourir  Le Messager d’Allah se leva les bras. » (rapporté par Boukhari , 967 et Mouslim 897).

Le fidèle qui assiste au sermon peut corriger une faute commise par le prêcheur dans la récitation d’un verset, il peut aussi, en cas de nécessité, lui indiquer le verset suivant. De même, il est permis de répondre au prêcheur s’il avance une affirmation entachée de polythéisme ou abominablement hérétique au cours de son sermon, pourvu que cette réaction ne risque de provoquer des troubles ou d’entraîner des conséquences pires dans la mosquée. Si tel est le cas, il faut ajourner la réponse à la fin du sermon. Puis on corrige et explique. Si le prêcheur profère de fausse paroles, il ne faut pas l’écouter. À ce propos, il est rapporté que certains parmi les ancêtres pieux se retrouvaient auprès du tyrannique Hadjdjadj alors qu’il maudit Ali ( P.A.a) sur la chaire et ils dirent :   Il ne nous a pas été ordonné d’écouter ces propos .

Il est permis d’effectuer la prière de salutation à la mosquée ; c’est même un devoir, même si l’imam est en train de faire son sermon, compte tenu du hadith de Djabir Ibn Abd Allah dans lequel il dit : «  Un homme arriva alors que le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) prononçait son discours du vendredi et il lui dit : as-tu prié , Ô un Tel?  Non  dit l’autre »   Alors lève -toi et effectue deux rak’a  Dit le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) ( rapporté par Boukhari, 888 et Mouslim 875.

Quand on s’aperçoit que quelqu’un parle, il n’est pas permis de lui dire de se taire comme nous l’avons déjà dit, mais on peut lui faire signe de se taire en mettant un doigt sur les lèvres par exemple. Allah le Très Haut le sait mieux.

Source: Sheikh Muhammed Salih Al-Munajjid