Samedi 6 Chawwaal 1446 - 5 avril 2025
Français

La règle qui régit l’expression euphémique de la répudiation.

Question

Laquelle de ces expressions renvoient-elles à la répudiation:
 Il répand Sa miséricorde sur vous. 
 Seigneur, donne-moi une autre meilleure et à elle un autre meilleur que moi. 

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Premièrement :

La règle qui régit l’expression euphémique de la répudiation inclut l’usage de tout terme susceptible d’exprimer la répudiation et d’autres sens. C’est comme : "va chez tes parents" ou "c’en est fini entre nous" etc.

On lit dans Hachiyat Al-Boudjayrimi ‘Ala Al-Khatib (3/491) : « Son dire : « C’est tout ce qui est susceptible d’exprimer la répudiation et d’autres sens »  la règle en cela veut que le terme véhicule un sens qui suggère la répudiation alors qu’il n’est pas courant de lui donner ce sens selon la coutume et la loi religieuse. »

On lit dans l’Encyclopédie du Fiqh (26/29) : « De même, ils sont tous d’avis que l’expression euphémique en matière de répudiation est toute expression qui, en principe, n’est pas établie pour traduire la répudiation mais qui peut la laisser entendre entre autres choses. L’expression qui ne la laisse pans entendre n’a rien à voir avec l’euphémisme, et ce ne serai que des propos futiles qui n’entrainent aucun effet. »

Cheikh Ibn Outheïmine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Toute expression qui suggère la séparation relève de l’euphémisme. » Extrait de Ach-Charh Al-Moumti’e : (13/70).

Deuxièmement :

La répudiation ne devient pas effective quand elle est exprimée euphémiquement sauf à deux conditions :

- L’intention du locuteur d’exprimer la répudiation .

- L’emploi d’un terme qui suggère la répudiation. Si on emploie un terme qui n’indique pas la répudiation, ni du point de vue de la Charia, ni du point de vue de la coutume, la répudiation ne devient pas effective même s’il en avait vraiment l’intention.

L’imam Ibn Al-Qayyim (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit : « L’emploi d’une expression euphémique ne rend la répudiation effective que quand le locuteur nourrit cette intention et emploie des termes expressifs. En l’absence de l’une des deux choses, la répudiation ne devient pas effective. C’est le cas encore pour l’affranchissement. »

Classer les termes en termes francs et euphémiques reste linguistiquement juste. Mais l’usage varie en fonction des personnes, du temps et de l’endroit. Il n’y a là aucun statut déterminé et spécifique du terme lui-même. Car parfois un terme est jugé explicite par des gens alors qu’il relève de l’euphémisme pour d’autres. Que de fois une expression est jugée claire dans un temps et dans un endroit et euphémique ailleurs et en d’autres temps. La réalité le prouve. Le terme "As-Sarah" (libération) n’est presque employé par personne pour exprimer une répudiation claire ou euphémique. Dès lors, on ne peut dire que celui qui l’emploie a prononcé une répudiation effective ; qu’il en ait eu l’intention ou pas. » Extrait de Zad Al-Ma’ad (5/291).

Cela étant, l’expression "Yanchour Lakoum Rabboukoum Min Rahmatihi" (Votre Seigneur répandra de Sa miséricorde sur vous) n’indique pas la répudiation, ni du point de vue religieux, ni du point de vue coutumier. Elle n’est donc pas une expression euphémique de la répudiation.

Quant à l’expression "Allahoumma Oukhlouf li Khayran minha wa Oukhlouf laha Khayran Minni" (Ô Allah, compense-moi une autre meilleure qu’elle et compense-la un autre meilleur que moi), il a été rapporté de l’imam Ahmed (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) que l’invocation qui véhicule le sens de la répudiation peut être une des expressions de la répudiation.

On l’a interrogé sur le cas de quelqu’un qui avait dit à son épouse : "Farraqa Allah Baïni wa Baïnaki fi Ad-Dounia wa Al-Akhira" (Puisse Allah nous séparer ici-bas et dans l’au-delà). L’imam a dit : « S’il ne voulait que prononcer une invocation (Douaa), j’espère qu’il n’en résulte rien (la répudiation n’est pas effective). » Voir Massaïl Abou Dawoud par l’imam Ahmed : (p.239) ; Al-Insaf : (8/478).

L’imam Ibn Mouflih (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) commente ce qui précède dans Al-Fourou’ (9/38) en ces termes : « Il (l’imam Ahmed) ne lui donne aucun sens (de répudiation) quand celui qui l’emploie n’entend que faire une invocation. Apparemment, l’expression compte si l’intention du locuteur est la répudiation ou qu’il la dise de manière absolue, et ceci sur la base que la séparation est franche ou compte tenu du contexte. »

Ensuite il a mentionné un cas qui ressemble à cette question avant de dire : « Voilà trois sujets qui partagent le même statut. Il parait que chaque sujet est l’objet de deux avis :

1-Doit-on tenir compte du contexte pour donner à l’expression (invocation) un sens large et qu’elle reflète l’intention ?

2-Ou bien doit-on considérer l’intention ? »

En d’autres termes, l’invocation "Puisse Allah nous séparer ici-bas et dans l’au-delà" relève des expressions euphémiques de la répudiation.

Deux avis concernant les expressions euphémiques ont été rapporté de l’imam Ahmed : l’expression euphémique doit-elle s’accompagner de l’intention pour entrainer la répudiation ? Ou bien il suffit de se fier à ce que le contexte permet d’en déduire ?

On a déjà expliqué dans des différentes Fatawas publiées dans le présent site que l’avis le plus prépondérant est que les expressions euphémiques de la répudiation n’entrainent une répudiation effective que quand on en a l’intention. Le seul contexte ne suffit pas.

Cela étant, l’invocation citée dans la présente question : "Ô Allah, compense-moi une autre meilleure qu’elle et compense-la un autre meilleur que moi" relève des expressions euphémiques de la répudiation. Si le mari qui l’emploie nourrit l’intention d’exprimer la répudiation, celle-ci devient effective. Autrement, elle ne le devient pas.

Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.

Source: Islam Q&A