Mardi 2 Djoumada 2 1446 - 3 décembre 2024
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Légalité de la séparation entre les premières prières ramadaniennes nocturnes et celles situées à la fin de la nuit

Question

J’ai entendu dans une séquence Youtube que les dernières prières nocturnes relèvent de l’innovation en religion et que rien ne justifie la séparation entre les deux  parties  dites dites prières car elles forment une seule et unique pratique à situer soit au début , soit à la fin de la nuit. L’imam de la mosquée sacrée, Abdoullah al-Khalifi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a été le premier à les initier il y a 50 ans à un moment où la séparation n’existait pas. Comment juger le fait de les accomplir séparées comme on le fait de nos jours?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Premièrement, il est recommandé d’animer la nuit en prière particulièrement en Ramadan mais aussi en dehors du mois. C’est à faire en groupe suivant la pratique du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) perpétuée par ses compagnons.

Le temps de ces prières s’étale de la fin des prières régulières à faire après Isha jusqu’à l’aube. Le nombre des rakaa à faire n’est pas limité, vu ce hadith rapporté par al-Boukhari (472) et par Mouslim (749) d’après Abdoullah ibn Omar selon lequel un homme interpela le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) qui se trouvait sur le chaire:

-« Que pense-tu des prières nocturnes? »

-« Elles sont à faire par unité de deux rakaa.Quant on craint l’entrée de l’heure de la prière du matin, on les clos par une seule. »

Ces prières sont appelées traawiih (marquées par des pauses) car les fidèles se reposaient après chaque quatre rakaa.Le terme tahadjdajoud signifie se mettre debout pour prier notamment après un moment de sommeil. La nuit tout entière peut abriter les dites prières. On ferait bien de la passer entièrement en prière. Si on se limite à en passer le début ou la fin en prière, cela ne représente aucun inconvénient.Rien ne l’interdit car c’est ce que font les musulman depuis très long temps. C’est une option qu’ils ont prise pour se faciliter les choses. Les ulémas contemporains qui s’y opposent le font parce qu’ils croient que prier plus de 11 rakaa est une innovation. Ce qui est un avis faible parce que contraire à la portée générale de la réponse donnée par le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) ci-dessus mais aussi en opposition avec la pratique des compagnons et leurs successeurs qui portaient le nombre des rakaa à 20, à 39, voire plus.

L’imam at-Tirmidhi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde ) dit dans ses Sunan (3/160): « Une divergence existe au sein des ulémas à propos des prières nocturnes du Ramadan. Les gens pensent qu’on peut en porter le nombre de rakaa  à 41 y compris la rakaa de clôture. C’est l’avis retenu  et appliqué par les habitants de Médine. La plupart des ulémas s’en tiennent à ce qui a été rapporté d’après Omar, Ali et d’autres compagnons du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui), à savoir 20 rakaa. C’est l’avis de Thawri, d’Ibn al-Moubarak et de Chaafie. Ce dernier dit: « c’est  ce que les gens de notre ville , La Mecque, faisaient ; ils accomplissaient une prière de 20 rakaa. » Ahmad dit: « on a rapporté diverses versions que rien n’a tranché. » Isaac lui dit: «Nous choisissons 41 rakaa conformément à ce qui a été rapporté d’après Oubey ibn Kaab. »

Dans al-Istidhkaar (2/69), Ibn Abdoul Barr dit: « On a rapporté 20 rakaa d’après Ali, Choutayr ibn Chakl, Ibn Abi Moulaykah, al-Harith al-Hamdadani et  Aboul Bakhtari. C’est aussi l’avis de la majorité adopté par les habitants de Koufa , par Chaafie et la majorité des jurisconsultes. C’est l’avis juste reçu d’Oubey ibn Kaab qu’aucun des compagnons n’avait contesté. Ataa dit: « Nous avons vécu avec des gens qui portaient les rakaa à 23 y compris celle de la fin.» Voir le Mousannaf d’Ibn Abi Chaybah (2/163) Voir la réponse donnée à la question n° 82152.

Par ailleurs, quelle est la différence entre le fait de procéder à une prière de 20 ou 23 rakaa non interrompues et le fait d’accomplir 8 ou 10 rakaa au début de la nuit et 11 à sa fin?

Ce qui importe est que ces prières ne sont pas soumises à un nombre limité de rakaa et qu’elles peuvent avoir lieu durant toute la nuit.Le fait d’en séparer les parties ne repose pas sur un motif cultuel car c’est juste une commodité. On y vise du bien puisqu’on cherche à placer une partie des prières dans le dernier tiers de la nuit. Celui qui admet ce raisonnement  ne peut pas s’opposer à la répartition des prières en deux parties.

Dans son Ithaaf Ahlil imaan bi madjaalis chahr ar-Ramadan, Cheikh Salih al-Fawzaan dit: « En ce qui concerne les dix dernières nuits du Ramadan, les musulmans ont l’habitude d’y redoubler d’efforts en suivant l’exemple du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et dans le but de tomber sur la nuit du Destin jugée meilleure que mille mois. Ceux qui accomplissent 23 rakaa au début du mois les répartissent au cours des dix dernières nuits  de sorte à en situer dix au début de la nuit et les appeler taraawiih, et dix autres à la fin de la nuit qu’ils prolongent et les appellent quiyaam.La différence est purement nominale car les deux parties peuvent être appelées  taraawiih ou quiyaam.

Quant à celui qui a l’habitude de faire une prière de 11 ou 13 rakaa au début du mois , il peut y ajouter 10 au cours des dix dernières nuits, à faire à la fin de la nuit, quitte à les prolonger , histoire de profiter du mérite de ces nuits, et pour faire davantage de bien.Celui qui agit de la sorte compte des prédécesseurs parmi les Compagnons et d’autres qui portaient le nombre de rakaa à 23 comme on l’a déjà dit. Ce qui permet de concilier les deux avis, celui qui parle de 13 au cours des 20 premiers jours et celui qui parle de 23 au cours des dix dernières nuits. Voir le reste de ses propos sous ce lien http://iswy.co/evnq3

Deuxièmement, cette séparation et cette division sont très anciennes contrairement à ce qui est dit dans la présente question à savoir que cela remonte à une cinquantaine d’années.

Ibn Radjab (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: « Al-Maroudhi a rapporté d’après Ahmad à propos d’un homme qui prie au cours du mois de Ramadan: « il dirige la prière pour un groupe jusqu’à la fin puis s’en va diriger la prière pour un autre groupe. Il doit séparer les deux prière par un acte quelconque  tel que manger , boire ou s’asseoir. »

Abou Hafs al-Barmaki dit: «C’est parce que on réprouve qu’il reprenne immédiatement une prière après en avoir clos une autre. S’il s’occupe de quelque choses entre les deux , il sépare la deuxième de la première, si les deux se déroulent au même endroit. Car si la seconde a lieu ailleurs, son seul déplacement constitue un acte de séparation.Le prieur n’aura pas besoin de répéter la rakaa de clôture car on n’en fait  ps deux dans la même nuit. »

Le texte reçu d’Ahmad dit le contraire. En effet, il est dit dans la version de Salih: « Si un homme accomplit la rakaa de clôture avec l’imam  puis rentre chez lui, il me plait qu’il le fasse après s’être couché (pendant un instant) ou suite à un long entretien. » Les versions reçues d’Ahmad portent sur l’aller retour en Ramadan qui consiste à ce qu’un groupe prie dans la mosquée puis la quitte puis y retourne à la fin de la nuit pour prier encore ensemble. C’est l’explication donnée du terme Taaquib (aller et retour) par Abou Bakre Abdoul Aziz ibn Djaafar et d’autres parmi nos condisciples.

Al-Maroudhi et d’autres ont rapporté de lui que cela ne représente aucun inconvénient. Le même avis est rapporté d’Anas. Il a été rapporté d’Ibn al-Hakam qu’il le réprouvait et attribuait la même réprobation à Anas, Abi Madjliz et d’autres. Il faut retarder la prière dite quyaam jusqu’à la fin de la nuit, comme dit Omar. Abou Bakre Abdoul Aziz dit: « L’avis de Muhammad ibn al-Hakam est de longue date. La pratique est fondée sur la version retenue par le groupe (disciples)  selon lequel la pratique (aller retour) ne représente aucun inconvénient. »

Pour Thawri, cette pratique est une innovation. Une partie de nos condisciples soutient résolument sa réprobation, à moins qu’on se couche un moment (après les premières prières) ou alors  reporte les prières jus’à minuit. Ils (les condisciples) formulent la condition qu’on fasse la rakaa de clôture au cours de la première prière en groupe. C’est l’avis d’Ibn Hamid, d’al-Qadi et ses compagnons. Ahmad , lui n’a pas formulé cette condition. Pour la majorité des jurisconsultes , la pratique n’est l’objet d’aucune réprobation.

Ibn Mansour a rapporté d’Isaac ibn Rahouya que si l’imam termine les taraawiih au début de la nuit, il es réprouvé qu’il revienne diriger la prière pour un groupe à la fin de la nuit car il est rapporté qu’Anas et Said ibn Djoubayr l’ont réprouvé. Si l’imam ne clôt pas la prière faite au début de la nuit et retarde la clôture jusqu’à la fin de la nuit , ce n’est plus réprouvé. » Extrait de Fateh al-Bari d’Ibn Radjab (9/174).

La réprobation s’applique au cas où l’imam accomplirait avec le premier groupe une rakaa de clôture au début de la nuit et revenait plus tard pour diriger une autre prière en groupe, comme le font certaines personnes. Il demeure vrai que la majorité exclut la réprobation, comme le dit Ibn Radjab.Il s’agit d’un vieux débat déjà suscité au temps des ancêtres pieux.

Cheikh Ibn Outhaymine (puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit: « Ses propos: non aller retour en groupe » signifie qu’il n’est pas réprouvé de prier après avoir accompli les taraawiih par une rakaa de clôture. L’aller retour consiste à prier en groupe après la clôture de la première série de prière en groupe. Ses propos impliquent apparemment: même si les prières se déroulaient dans une mosquée.En voici un exemple: « Ils ont accompli les taraawiih suivies d’une rakaa de clôture à la mosquée et puis ils ont dit: revenons à la fin de la nuit afin de prier en groupe. Cette manière de faire n’est pas réprouvée selon les dires de l’auteur. Mais cet avis est faible car il est fondé sur une tradition reçue d’Anas ibn Malick (P.A.a) qui a dit que la pratique ne représente aucun inconvénient, car les prieurs concernés ne feraient que reprendre un bon acte qui suscite de l’espoir. En d’autres termes, ne reprenez les prières que pour un bien que vous espérez obtenir. A supposer que cette tradition soit vérifiée, elle contredit la parole du Prophète (Bénédictin et salut soient sur lui): « Clôturez vos prières nocturnes par une rakaa. » Si le premier groupe ayant ainsi clôturé leurs prières par une rakaa revenait ensuite prier, leurs prières nocturnes n’auraient pas été clôturées par une seule rakaa. Aussi l’avis le mieux argumenté est que l’aller retour en question est réprouvé. C’est l’un des deux avis reçus de l’imam Ahmad (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde. L’auteur d’al-Mouqnie, d’al-fouroue, d’al-faiq et d’autres semble penser que que les deux avis sont égaux puisqu’aucun n’est mieux argumenté que l’autre. Si toutefois l’aller retour survenait après les taraawiih mais avant la rakaa de clôture, l’avis excluant la réprobation serait juste. C’est ce que font les gens actuellement au cours des dix dernières nuits du Ramadan. En effet, ils accomplissent les taraawiih en début de nuit puis reviennent faire le tahadjoud en fin de nuit. » Extrait d’ach- Charh al-moumtie (4/67)

Allah le sait mieux.

Source: Islam Q&A