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Louange à Allah.
Louanges à AllahIl n’y a aucun inconvénient pour vous à travailler comme conducteur de train dans un pays non musulman. Nous ne voyons aucune appréhension justifiant l’abandon d’une telle activité. C’est un gagne-pain licite, s’il plaît à Allah. Ceci s’explique par plusieurs raisons.
Premièrement, le contrat qui vous lie à la société qui gère les trains se limite à la seule conduite et ne s’étend pas au contrôle du ‘transport d’objets prohibés’. Or, ce qui compte dans les contrats du point de vue de la responsabilité fondamentale concernant précisément l’objet du contrat, est, le cas échéant, purement licite. Il s’agit de la conduite.
Quant à la malédiction proférée contre le transporteur du vin, elle est destinée à celui qui l’assure à dessin et signe un contrat pour en tirer profit et aider à sa consommation, choses qui n’ont rien à voir avec la conduite des trains et le pilotage des avions.
Deuxièmement, le service qui fonde le contrat étant licite, vous n’êtes pas tenu d’interroger les voyageurs sur ce qu’ils apportent à bord ni de fouiller leurs bagages. Vous n’en êtes pas responsable. Le transport concerne les personnes. La loi religieuse ne s’intéresse pas à leurs bagages. La vie serait très dure pour les gens, même en pays musulmans, si chaque chauffeur devait interroger ses passagers sur leurs bagages par crainte qu’ils ne détiennent du tabac ou des éléments prohibés contenus dans les téléphones intelligents d’utilisation courante aujourd’hui. N’y aurait-il pas là des formes de rigorisme et de zèle que la Charia ne saurait approuver ?
Si nous imposions une telle charge au conducteur de train et au pilote de ligne, nous devrions aller jusqu’à leur demander d’interroger tous les passagers sur leur destination finale et l’objet de leur déplacement. S’il s’avérait que la destination était déconseillée ou l’objet du voyage appréhensible, le conducteur du train ou le pilote s’abstiendrait de décoller ! Nous croyons que personne n’hésite à juger nulle une telle manière d’établir un lien entre les choses. Il s’y ajoute que de telles considérations ne sont pas reconnues par la charia du moment que le service qui fonde le contrat, en l’occurrence la conduite de train, est licite et permis .Allah soit loué.
Troisièmement, vous avez mentionné dans votre question que vous ne savez pas ce que les voyageurs apportent à abord avec eux. La raison en est que le conducteur se trouve habituellement isolé des passagers parce que logé dans une cabine à part. Cette situation rend impossible pour lui de connaitre ce que les passagers apportent à bord dans des valises fermées. L’impossibilité de posséder cette connaissance lui enlève toute responsabilité à cet égard.
Quatrièmement, si nous réfléchissions sur cette règle juridique admise dans l’ensemble : ‘on pardonne dans le dépendant ce qu’on ne pardonne pas dans ce dont il dépend’ nous serions sûrs que la permission correspond au statut prévu dans la question posée. En effet, les objets illicites portés par certains est un résultat non visé du transport. Ce qui résulte d’un acte licite est pardonné. Il s’agit ici du transport des personnes et des bagages ordinaires qu’ils possèdent.
Les jurisconsultes ont conçu de nombreuses formulations de cette règle. Certaines de ces formulations s’approchent davantage à l’objet de la présente question. C’est le cas de cette parole de l’imam as-Sarakhsi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) :Un contrat de vente peut avoir une implication qui ne pourrait faire l’objet d’un contrat à part. Extrait d’al-Mabsout (11/179). Il en est de même de la parole d’al-Qadouri : Des implications de contrats peuvent ne pouvoir faire l’objet de contrats à part. Extrait d’at-Tadjrid (8/3792). C’est encore dans ce sens que l’mam as-Souyouti (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit : Dans une affaire, on peut pardonner implicitement ce qui ne saurait être pardonné délibérément. Extrait d’al-achyaa wa an-nadzair, p. 120. Voir hachiyatou al-attar alaa charh al-djallal al-Mahali alaa djami djawaami (2/160) et muallimatou Zaid liqawaid al-fiqhiyya waloussouliyyah (11/531).
Figure parmi les exemples de la règle cités par les jurisconsultes la possibilité de louer un service à quelqu’un qui en fait un usage illicite. C’est le cas d’un chrétien qui prend auprès d’un musulman une maison en location avec la possibilité de l’utiliser éventuellement pour mener des activités illicites non annoncées au départ. Ce cas est pardonné. Le bailleur ne commet aucun péché. Seul le locataire en commet. Le premier doit l’en empêcher s’il est mis au courant à temps selon l’avis des Hanbalites.
L’imam Muhammad ibn al-Hassan ach-chaybani (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit : Si un chrétien résident en pays musulman loue une maison auprès d’un musulman pour l’occuper, cela ne fait l’objet d’aucun inconvénient. S’il y boit du vin ou y pratique le culte de la croix ou y amène du porc, le musulman n’en assume aucune responsabilité puisqu’il ne lui a pas loué la maison pour cet usage. Extrait d’al-Asl (4/17).
À notre connaissance, aucun uléma n’a dit qu’il est interditde procéder à une location licite devant entraîner un usage licite et conforme à l’objet du contrat pour la seule crainte que l’objet ou le service loué puisse être accidentellementutilisé illicitement. Si un uléma émettait un avis dans ce sens, cela gênerait les gens terriblement.
Ce qui est dit dans la question relève de ce chapitre. Le conducteur du moyen de locomotion n’assume aucune responsabilité dans la situation évoquée. La responsabilité incombe exclusivement aux propriétaires des bagages.
Cinquièmement, cela dit, les ulémas sont tous d’avis qu’on n’estpas tenus de parer aux éventualités peu probables et de les prévenir car ce serait une source de gênes et de difficultés dans plusieurs autres secteurs de la vie. C’est dans ce sens qu’ils disent qu’il ne faut pas généraliser l’interdiction de la culture de la vigne en dépit du fait que cette culture est un moyen de la production du vin. En effet, la culture est un moyen indirect qui peut aussi entrainer un usage licite de la part des consommateurs du raisin. Dans ce cas de figure, la règle de prévention des conséquences négatives peu probable ne s’applique pas.
L’imam al-Qarafi (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) dit : Des exemples peuvent être donnés sur ce dont la Umma exclut unanimement l’interdiction et le considère comme un mauvais prétexte à ne pas retenir et un moyen à ne pas éradiquer. C’est le cas de la culture de la vigne susceptible de conduire à la production du vin. Pourtant personne n’a interdit la production du raisin par crainte qu’il soit transformé en vin. Extrait d’al-Fouroq (2/42).
C’est exactement le cas dans la présente question. Interdire la conduite des trains sous prétexte qu’un passager pourrait amener à bord des éléments interdits comme du vin ou d’autres produits gênerait les gens terriblement dans les affaires de leur vie et leur fermerait inutilementla porte du licite.
En somme, il n’y a aucun inconvénient à travailler comme conducteur de train dans un pays non musulman à moins que le contrat de travail précise le transport de marchandises illicites. Dans ce cas, il est interdit d’accepter la partie du contrat portant sur le transport d’objets illicites.
Allah le sait mieux.