Louange à Allah.
Deux avis se dégagent de la divergence qui oppose les ulémas sur le sujet. Selon le premier avis, les deux termes ont la même signification et que rien ne les distingue. C’est l’avis choisi par Djarir at-Tabari et d’autres. At-Tabari (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) s’explique: al-hamd lilAllah signifie tout simplement ach-choukre lilAllah, les deux phrases exprimant une louange sincère exclusivement réservée à Allah l’Auguste .. Plus loin, il poursuit: « Ceux qui maitrisent les dialectes arabes jugent justes des propos tels: al-hamdou lillahi choukran (louange à Allah par reconnaissance). Cela étant exact pour eux tous , on peut employer al-hamdoulliaah à la place de ach-choukrou lillah et que l’inverse est aussi valable, car s’il en était autrement , il ne serait pas permis de dire: al-hamdoullillah choukran Extrait du Tafsir de Tabari (1/138).
Le second avis est que les deux termes n’ont pas le même sens puisqu’il existe des différences entre eux, notamment celles-ci:
1.Hamd renvoie à l’expression verbale de la gratitude contrairement à choukre qui peut être exprimé non seulement par la langue, mais aussi par le coeur et les autres organes.
2.Hamd peut répondre à un bienfait comme il peut ne pas en être motivé, contrairement à choukre qui s’exprime toujours en réponse à un bienfait.
Réfutant les propos susmentionnés d’Ibn Djariir , Ibn Kathir (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) (1/32): « Ce que prétend Ibn Djarir est discutable car il est répandu au sein de bon nombre d’ulémas contemporains que hamd consiste à exprimer un hommage rendu à un individu louable aussi bien pour ses qualités intrinsèques que pour celles qui profitent aux autres alors que choukre traduit la reconnaissance opposée à ces dernières, et s’exprime par le coeur , la langue et les autres organes. C’est dans ce sens qu’un poète dit:
« Ma gratitude envers Lui s’exprime à travers trois (voies)
ma main , ma langue et ma conscience invisible »
Une autre divergence de vues porte sur la question de savoir le quel des deux termes a une portée plus générale. Deux avis en ont émergé. La vérification montre que parfois l’un a une portée plus générale parfois il a une portée plus particulière. Hamd couvre un champ sémantique plus vaste par rapport à l’objet des deux termes car il peut porter sur les qualités intrinsèques (ce que l’on est) comme il peut porter sur les qualités qui affectent les rapports de l’individu avec les autres (ce que l’on fait). On peut l’employer pour louer la noblesse ou la générosité de quelqu’un. Mais il couvre un sens plus restreint car il se limite à la louange verbale. Choukre concerne un champs sémantique plus vaste par rapport à l’objet d’utilisation des deux termes car il peut se traduire dans l’acte , la parole et l’intention, comme on l’a déjà dit. Cependant, il reste plus restreint car il ne porte que sur les qualités qui profitent aux autres. On ne l’emploie pas pour louer la bravoure de quelqu’un mais pour le remercier à cause de sa générosité et sa bienfaisance envers celui qui le remercie. Voilà en substance le quintessence des réflexions des contemporains. » Allah le sait mieux.
Voilà sur quoi Abou Hilal al-Askar (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) s’est appuyé pour établir la différence entre les deux notions : « La différence entre choukre et hamd est que le premier consiste à exprimer sa gratitude pour un bienfait reçu. Que celui-ci soit en rapport avec les vertus comme le savoir ou en rapport avec les mérites comme la piété. Le second est un acte inspiré par la vénération de l’Auteur du bienfait pour celui-ci. Que l’acte consiste dans l’expression d’un attribut ou dans la confirmation d’une croyance ou dans un amour ancré dans le coeur ou dans une pratique ou un service relevant des piliers.
Un poète les a réunis dans ce vers déjà cité:
« Ma gratitude envers Lui s’exprime à travers trois (voies)
ma main , ma langue et ma conscience invisible »
Hamd a une porté relativement plus vaste car il englobe le bienfait et d’autres . Mais sa portée n’en est pas moins restreinte du fait que seule langue l’exprime. Ce qui est le contraire du choukre dans la mesure où son objet se limite au bienfait mais elle peut être exprimé par la langue et par d’autres moyens. La portée de l’une des notions est d’une part plus générale, et de l’autre plus restreinte. Elles portent toutes les deux sur l’expression verbale de la gratitude pour un acte de bienfaisance. Mais elles se distinguent l’une de l’autre en ceci que hamd s’applique à une qualité (personnelle) comme la possession du savoir , par exemple.Le choukre se distingue en ceci qu’il s’applique à l’amour profond pour le bienfaiteur à cause de la bienfaisance. » Extrait d’al-fourouq al-loughawwiyyah, (201-202).
Ibn al-Qayyim (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit dans Madaaridj as-salikiine (2/246): « La différence entre les deux notions est que choukre a une portée plus générale vu sous l’angle de ses manifestations et moyens . Mais sa portée demeure plus restreinte par rapport à son objet. Hamd a une portée plus générale par rapport à son objet et plus restreinte par rapport à ses causes. En d’autres termes, le choukre du coeur se traduit par la parfaite humilité et celui de la langue par la gratitude et la louange et celui des autres organes par l’obéissance inconditionnelle.
Son objet se limite aux bienfaits et ne s’étend pas aux attributs divins. On ne dit pas : nous rendons grâce à Allah (choukre) pour Sa Vie, Son Ouïe, Sa Vue et Sa science, bien qu’Il soit loué (hamd) en cela comme Il l’est pour Sa bienfaisance et Sa justice. Choukre est motivé par la bienfaisance et les bienfaits (reçus). Tout ce qui fait l’objet du choukre fait l’objet du hamd. Ce qui n’est pas le contraire. Tout ce qui est utilisé pour exprimer hamd peut l’être pour exprimer le choukre. Mais l’inverse n’est pas juste car le choukre peut s’exprimer à travers les organes autres que le coeur et la langue seuls à utiliser dans expression du hamd.»
Allah le sait mieux.