Lundi 24 Djoumada 1 1446 - 25 novembre 2024
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Les dispositions régissant un objet prêté

Question

Que signifie « Al-A’ariya » et quelles sont les dispositions qui la régissent ?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Les Fouqahas (Puisse Allah leur accorder Sa miséricorde) ont défini « Al-A’ariya » en disant : « C'est la permission de l’utilisation d’une chose qu'il est licite d'en profiter mais elle doit rester intacte après son usage afin de la restituer à son propriétaire. »

 Cette définition exclut toute chose qu’on ne peut utiliser sans l'altérer ou l'endommager comme les denrées alimentaires ou les boissons.

Le prêt est institué par le Coran, la Sunna et le consensus des ulémas. Allah le Très-haut dit : « et s’abstiennent de prêter l'ustensile (à autrui). » (Coran :107/7) C’est-à-dire les ustensiles que les uns prêtent habituellement aux autres. Il condamne ceux qui refusent de les prêter à celui qui vient les emprunter. Ce noble verset sert d’argument à ceux qui soutiennent l’avis que c’est un devoir de prêter les objets (à celui qui les demande). Et c’est le choix de Cheikh Al-Islam, Ibn Taymiyya, (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde), si le propriétaire de l’objet est riche.

Le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a emprunté un cheval à Abou Talha comme il a emprunté des boucliers à Safwan Ibn Oumeyya.

Prêter les objets à celui qui en a besoin est un acte louable susceptible de nous rapprocher d’Allah et de nous valoir une grande récompense car il s’inscrit dans le cadre général de l'aide dans la bienfaisance et la piété.

Le prêt d’objets correct requiert le respect de quatre conditions :

La première condition : Le prêteur doit être habilité à l’accorder. En effet, le prêt est une sorte de don et il est invalide qu’un enfant ou un fou ou un ignare le fasse.

La deuxième condition : L’emprunteur doit être habilité à accepter le prêt de sorte que son acceptation du prêt soit valide.

La troisième condition : La licéité de l’usage de l’objet emprunté, par exemple il n’est-il pas permis de prêter un esclave musulman à un mécréant, ni un gibier (de chasse) à un pèlerin en état d’Ihram, compte tenu de la parole d’Allah le Très-Haut : « Entraidez-vous dans l'accomplissement des bonnes œuvres et de la piété et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. » (Coran : 5/2)

La quatrième condition : La chose prêtée, après en avoir profité, doit rester intacte après son usage.

Le prêteur a le droit de récupérer ce qu’il a prêté quand il le veut, à moins que la récupération de l’objet prêté ne porte préjudice à l’emprunteur. C’est par exemple comme le cas de celui qui prête un bateau à quelqu’un pour transporter ses biens. Il ne peut pas récupérer son bateau alors qu’il est encore en pleine mer. C’est encore comme le cas de celui qui prête un mur à quelqu’un pour qu’il y place des planches de bois. Il ne peut revenir sur le prêt tant que les planches de bois sont sur le mur.

L’emprunteur doit bien veiller à protéger ce qu’il a emprunté plus que ce qu’il le fait pour ses propres biens afin de le restituer intact à son propriétaire. Car Allah dit : « Certes, Allah vous commande de rendre les dépôts (qui vous sont confiés) à leurs ayants-droits. » (Coran : 4/58). Ce verset prouve qu'il est obligatoire de restituer les dépôts et donc les objets prêtés. Dans le même sens, le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit : « Restitue le dépôt à celui qui te l’a confié. »

Tous ces textes légaux indiquent qu’on doit bien garder ce qu’on nous confie, dont les prêts, et de le restituer intact au propriétaire.

L’objet prêté est confié à l’emprunteur qu'il doit restituer, on lui a permis de tirer profit de l’objet prêté dans le sens convenable. Il ne lui est pas permis d’en faire un usage abusif de manière à le détériorer ou l'utiliser dans un usage qui ne lui convient pas, car le propriétaire ne le lui a pas autorisé et parce qu’Allah, le Très-Haut, dit : « Y a-t-il d'autre récompense pour le bien, que le bien ? » (Coran : 55/60).

Si l’emprunteur utilise l’objet prêté dans un usage différent de celui pour lequel il a été prêté et que cela en entraîne la détérioration, il doit en assurer la garantie, conformément à la parole du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) : « Celui qui prend un objet doit en assurer la sauvegarde jusqu’à sa restitution. » (Rapporté par les Cinq Imams du hadith et jugé authentique par Al-Hakem). Ce qui indique qu’il est obligatoire de restituer ce qu’on a pris parce que c’est la propriété d’autrui et qu’on ne peut en être acquitté avant de le restituer à son propriétaire ou à celui qui le représente.

Si l’objet s’altère au cours d’un usage normal (dans les limites que le prêteur en a autorisé l’usage), l’emprunteur n’est pas garant parce le prêteur lui a autorisé l’usage, et les conséquences de la permission d’utilisations ne sont pas garanties.

Cela dit, une divergence de vues oppose les ulémas à propos de la garantie de l’objet prêté utilisé dans un domaine autre que celui pour lequel il a été emprunté. Un groupe de ulémas soutient l'obligation à l’emprunteur de le garantir, qu'il soit fautif ou pas, vu la notion générale de la parole du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) : « Celui qui prend un objet doit en assurer la sauvegarde jusqu’à sa restitution. » Par exemple une monture qui meurt ou un vêtement qui brûle ou un bien prêté qu’on vole.

Un autre groupe de ulémas soutient la non-garantie si l’emprunteur n’a pas commis d’abus car la garantie n'est obligatoire que s'il y a un usage abusif. Et il semble que cet avis est le mieux argumenté car l’emprunteur a pris l’objet (prêté) avec l’autorisation de son propriétaire, et pour lui c’est comme un dépôt qu’on lui a confié.

Quoiqu’il en soit l’emprunteur doit veiller attentivement à préserver l’objet prêté et s’empresser de le restituer dès qu’il a fini de l’utiliser. Il ne faut pas l’utiliser avec négligence ou l’exposer à la détérioration car c’est un dépôt qui lui a été confié par quelqu’un qui a voulu lui faire du bien. Or, Y a-t-il d'autre récompense pour le bien, que le bien ? !

Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.

Source: livre intitulé al-moulakhkhas al-fiqhi par Salih aal-Fawzan