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La cause de l’interdiction de la consommation du vin réside –t-elle dans l’ivresse ? Dans ce cas, la consommation du vin sans alcool ne serait pas interdite? C’est-à-dire quand le taux d’alcoolémie est de 0%. Pourtant j’ai lu dans votre site une fatwa de notre cheikh Ibn Outhaymine selon laquelle le vin dont la consommation n’entraine pas l’ivresse n’est pas du vin. On sait que le vin qui existe en Amérique est alcoolisé mais on le débarrasse parfois de l’alcool par des moyens artificiels. Comment juger ce vin sans alcool ?
Louange à Allah.
Louanges à Allah
Premièrement, le terme khamr désigne toute boisson dont la consommation entraîne l’ivresse ; qu’elle n’existât que dans le passé ou continue d’exister de nos jours ou existera plus tard ; qu’elle soit obtenue à partir du raisin, de l’orgue, de la datte, du maïs ou d’autres sources. Cela s’atteste dans la parole du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) : Tout ce qui entraîne l’ivresse est du khamr et tout khamr est interdit. (Rapporté par Mouslim, 2003). Le terme khamr désigne toute boisson dont la consommation entraîne l’ivresse. » Voir Ma’alim as-Saunan par al-Khattabi (4/264).
Cela étant, toute boisson dont la consommation n’entraîne pas l’ivresse n’est pas du khamr et n’est pas jugée interdite. Il faut toutefois s’assurer que la boisson concernée n’entraîne pas l’ivresse car on dit souvent de certaines boissons que leur consommation n’entraîne pas l’ivresse alors que cela n’est pas vrai.
Al-Hafidh dit : Toute disposition est liée à une cause. La cause de l’interdiction de la consommation du vin réside dans l’ivresse qui en découle. Dès lors, la consommation de toute source d’ivresseest interdite. Extrait de Fateh al-Bari (10/56). Voir la réponse donnée à la question n° 33763.
Deuxièmement, il n’est pas permis de traiter du vin pour le débarrasser de l’alcool. Cette opération rappelle à ce que les ulémas disent à propos de la transformation du vin en vinaigre. En effet, ce qui nous est demandé à propos du vin c’est de nous en éloigner conformément à la parole du Très-haut : Ô les croyants! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu'une abomination, œuvre du Diable. Ecartez-vous en, afin que vous réussissiez. (Coran, 5 : 90).
S’éloigner d’une chose c’est se mettred’un côté opposé à celui qu’elle occupe. » Extrait d’Adh-waa’ al-Bayan (3/33).
Le fait de le soumettre à traitement pour le débarrasser de l’alcool est le contraire de s’en éloigner. Cheikh al-Islam, Ibn Taymiya (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit : La détention du vin étant interdite, celui qui le garde dans le but de le transformer en vinaigre commet un acte interdit. Extrait de Madjmou’ al-Fatwas (21/503).
Il a été rapporté surement que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a interdit la transformation du vin en vinaigre. A ce propos, Mouslim a rapporté d’Anas ibn Malick que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) fut interrogé pour savoir si on pouvait transformer le vin en vinaigre et il répondit : non. » (Mouslim, 1983). Selon la version d’Abou Dawoud (3675) Abou Talhah interrogea le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) à propos du cas d’orphelins qui avaient hérité du vin et il dit :
- Déversez-le.
- Ne pourrais-je pas le transformer en vinaigre ?
- Non. (Hadith jugé authentique par an-Nawawi dans al-Madjmou’ (9/233) et Ibn al-Moulquin dans al-Badre al-mounir (6/630) et Cheikh al-Albani dans Sahih Abou Dawoud.
Cette interdiction entraîne l’illicéité. Si on pouvait en faire un autre usage ou le transformer de manière à pouvoir l’utiliser, il ne serait pas permis de le déverser. Pourtant le Prophète (Bénédiction et salut sur lui) le leur recommanda bien que les propriétaires fussent des orphelins dont aucune négligence n’était tolérée dans la gestion de leur patrimoine.
On lit dans les fatwas de la Commission Permanente (22/92) : Il faut déverser le vin en exécution de l’ordre du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) donné suite à la révélation des deux versets portant interdiction de l’usage du vin. Cette interdiction s’applique à sa conservation et son utilisation sous quelque forme que ce soit, notamment sa transformation totale ou partielle en vinaigre, son épuration de l’alcool et son mélange avec d’autres substances. Car le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a interdit la transformation du vin en vinaigre pour écarter tout prétexte (pouvant être utilisé pour contourner l’interdiction) et barrer la route à toute recomposition et utilisation le concernant. Voir la réponse donnée à la question n° 14276.
En somme, le traitement du vin pour en tirer l’alcool est une opération interdite. A supposer que cela soit fait, serait-il permis de le boire étant donné qu’il n’est plus apte à entraîner l’ivresse qui justifie l’interdiction de sa consommation ? Cheikh ibn Outhaymine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: « L’avis le plus répandu au sein de la doctrine (hanbalite) est que même transformé en vinaigre, le vin ne devient pas pur même s’il a perdu sa fermentation qui entraîne l’ivresse chez celui qui le consomme car la disparition de cette vertu a résulté d’un acte interdit. Dès lors, il ne produit plus son effet.
Pour certains ulémas, le vin devient ainsi pur et licite de consommation, même si la transformation reste interdite. Ceux-là s’expliquent en disant que la cause de l’impureté du vin réside dans son aptitude à rendre ivre. Quand cette aptitude disparait, sa consommation devient licite. Pour d’autres ulémas, si le transformateur fait partie de ceux qui croient la consommation du vin licite comme les juifs et les chrétiens, le produit devient puret sa consommation licite. Si l’auteur de la transformation est de ceux qui croient la consommation du vin illicite, le produit reste impur et interdit de consommation.
Cet avis est le plus plausible. Aussi le vinaigre provenant des juifs et des chrétiens est licite et pur car ils ont réalisé une opération qu’ils croient autorisée. » Extrait de charh al-moumti’ (1/250). Il dit encore : Si la transformation est faite par une personne qui croit cette opération permise ; qu’elle soit musulmane ou mécréante, serait-il permis (de consommer le produit) ?
L’avis juste est que ce serait permis car la transformation s’est déroulée licitement. Dès lors, il est permis aux musulmans de consommer le vinaigre importé des pays mécréants, même si la transformation est une œuvre humaine car l’auteur de l’acte est de ceux qui le croient permis. » Ach-Charh al-Moumt’i (10/53).
En somme, s’il est clair que la boisson en question est sans alcool, il n’y a pas de mal à la boire. Il en est de même si le produit résulte d’un traitement du vin opéré par quelqu’un qui croit cette opération permise. Il faut toutefois attirer l’attention sur le fait qu’une telle opération de transformation est interdite au musulman selon l’avis le mieux argumenté de ceux émis par les ulémas sur la question.
Allah le sait mieux.