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Le consensus, le raisonnement par analogie et leurs applications modernes

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Date de publication : 08-03-2015

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Question

Comment clarifier la différence entre le consensus et le raisonnement par analogie sur la base d’exemples clairs pris de l’époque et de nos réalités contemporaines ?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Louanges à Allah

Le consensus et le raisonnement par analogie font tous les deux partie des arguments globaux qui permettent d’établir des dispositions de la loi religieuse. Le consensus occupe à cet égard le troisième rang après le livre et la Sunna. Le consensus possède linguistiquement deux acceptions. L’une renvoie à la détermination comme c’est le cas dans la parole du Très-haut :  Déterminez-vous.  (Coran, 10 :71). L’autre désigne l’accord de tous. C’est dans ce sens qu’on dit : le groupe s’est mis d’accord sur une telle ou telle affaire. »

Quant à sa définition conventionnelle, az-Zarkachi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) en dit :  C’est l’accord établi au sein des ulémas de la communauté de Muhammad (Bénédiction et salut soient sur lui) capables de pratiquer l’effort personnel d’interprétation des textes religieux, accord survenu après son décès et portant sur l’une quelconque des affaires d’une époque.  Extrait d’al-Bahre al-mouhit (6/379). Cette définition permet de savoir que le consensus implique des conditions dont voici quelques- unes :

La première est qu’il doit s’agir d’un accord établi au sein des moudjtahid (grands ulémas) de la communauté de Muhammad (Bénédiction et salut soient sur lui), ce qui exclut les accords conclus au sein des peuples antérieurs.

La deuxième est sa survenue après le décès du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) car un consensus établi de son vivant n’aurait pas de sens.

La troisième est l’expression  d’une époque  vise à écarter la croyance que les moudjtahid, auteurs d’un consensus doivent vivre jusqu’au jour de la Résurrection, croyance qui est fausse parce que de nature à rendre le consensus inconcevable !

Le consensus est une preuve religieuse fondée sur l’infaillibilité de la communauté musulmane (dans son ensemble) qui ne peut pas se mettre d’accord sur une erreur selon un texte sûr de la Sunna purifiée. At-Tirmidhi (2167) a rapporté d’après Ibn Omar que le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit : Allah ne permet pas à ma communauté ou à la communauté de Muhammad (Bénédiction et salut soientsur lui) de se mettre d’accord sur une aberration.  (Déclaré authentique par al-Albani dans Sahih al-Djaami’ as-Sghir sous le numéro 1848.

Ahmad a cité dans son Mousnad (27224) un hadithrapporté par Abou Basra al-Ghifari, un compagnon du Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) que le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit :   J’ai demandé quatre choses à mon Maîtreet Il m’en a donné trois et m’a refusé une : j’ai demandé à Allah le Puissant et Majestueux de faire en sorte que ma communauté ne se mette d’accord sur erreur et Il me l’a donné. 

Des textes du Coran tendent en plus à confirmer ce principe (l’infaillibilité de la communauté dans son ensemble). Il en est cette parole du Très-haut :  Et quiconque fait scission d'avec le Messager, après que le droit chemin lui est apparu et suit un sentier autre que celui des croyants, alors Nous le laisserons comme il s'est détourné, et le brûlerons dans l'Enfer. Et quelle mauvaise destination!  (Coran, 4 :115).

Dans ce noble verset, Allah rend obligatoire pour tous de suivre le chemin des croyants et a mis en garde contre toute opposition. Ce qui indique le bien- fondé de leur consensus car s’il était possible qu’ils tombent tous dans l’erreur, celui qui a reçu l’ordre de les suivre, aurait reçu l’ordre de tomber dans l’erreur. Or, ce qui fait l’objet d’un ordre d’Allah ne peut pas ne pas être juste. » Se référer à al-foussoul il oussol (3/262).

Cheikh al-islam Ibn Taymiyyah (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) : Le consensus qui se dégage au sein de cette communauté est une preuve car Allah le Très-haut dit des membres de la communauté qu’ils ordonnent le bien et interdisent le mal. S’ils se mettaient d’accord à rendre l’illicite licite ou à supprimer un devoir ou à interdire une chose licite ou à attribuer à Allah Très-haut ou à Sa créature une fausse information, ils ordonneraient le mal et interdiraient le bien.  Extrait de madjmou’ fatawas (28/125).

Aussi apprend-t-on que la communauté mohammadienne est protégée par Allah le Transcendant contre l’établissement d’un accord portant sur l’aberration et l’erreur. Ceci implique un secret expliqué par az-Zarkachi en ces termes : « Le secret de la protection réservée à cette communauté contre l’adoption d’un faux consensus est qu’elle constitue la vraie communauté (religieuse). En effet, le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui)fut envoyé à l’humanité tout entière alors que les prophètes antérieurs étaient envoyés à leurs peuples.

Ces prophètes font partie d’un ensemble. Dès lors, on peut dire de chacune de leurs communautés qu’elle ne représente pas tous les croyants de l’époque. Quant à cette communauté, elle regroupe à elle seule tous les (vrais) croyants. La main d’Allah accompagne les croyants. Voilà pourquoi-Allah le sait mieux- elle détient le monopole de la vérité. » Extrait d’al-Bahre al-mouhit (6/396).

Des exemples de consensus

Il n’y a pas d’exemple qui remontent à l’époque du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) puisque nous avons déjà expliqué que le consensus ne peut se concevoir qu’après le décès du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui). Al-Aamadi dit :  Un consensus établi par des gens vivant pendant la descente de la révélation ne serait pas une preuve car le consensus n’est considéré comme tel qu’après le décès du Prophète (Bénédiction et salut soient su lui)  Extrait de al-ihkaal fii ousol al-ahkaam par al-Aamadi (1/213).

Quant aux exemples survenus après le décès du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui), ils sont nombreux, en voici une partie à titre d’illustration :

-un consensus s’est dégagé au des ulémas sur l’interdiction de construire des églises dans les pays musulmans. Ce consensus a été rapporté d’après cheikh al-islam Ibn Taymiyah. On lit dans al-fourou’ wa tas’hih al-fourou’ (10 /338) :  On leur interdit de créer des églises et des synagogues. Notre cheikh Ibn Taymiyah a mentionné que cela fait l’objet d’un consensus.  On lit encore dans al-insaaf fii maarfiati ar-radjih min al-khilaaf par al-Mourdawi (4/236) :  On leur interdit de créer des églises et des synagogues.  Cheikh Taquiddine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit que c’est un consensus. » Les condisciples en excluent les territoires obtenus à la suite d’un arrangement qui en fait notre possession. » As-Soubki l’a rapporté. On lit dans les fatawas d’as-Soubki (2/369) :  La construction des églises est interdite unanimement. 

Les exemples contemporains illustrant le consensus sont nombreux. Il en est le consensus qui s’est  dégagé au sein des ulémas musulmans sur l’interdiction de la représentation figurée du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et l’ensemble des autres prophètes (pse) dans les films et les documentaires. Ce consensus a été mentionné par cheikh Abou Baker Zayd (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) puisqu’il a dit :  Ceux qui autorisent de façon restreinte la représentation figurée sont tous d’avis que cette représentation est interdite quand elle concerne les prophètes et messagers (pse), les mères des croyants, les épouses du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et les califes bien guidés (P.A.a).  Extrait de Houkm at-Tamthil (1/43).

Quant au raisonnement par analogie, il constitue une source de dispositions religieuses. Il vient juste après le consensus. Il signifie linguistiquement estimation et égalité. Son sens conventionnel a été défini par Ibn Qoudamah en ces termes :  Assimiler un cas secondaire à un cas principal dans un statut qui les englobe  Extrait de Rawdhatou an-Nadhir wa djannatoul manadhir (2/141).

Le terme assimiler usité dans l’expression Assimiler un cas secondaire à un cas principal  signifie joindre et rendre deux choses égales quant à leur statut.

Le raisonnement par analogie repose sur quatre piliers : un statut d’origine, un cas secondaire, un jugement et une cause commune. Voici un exemple pour clarifier lesdits piliers : si nous disons : le jus de raisin fermenté rend ivre, ce qui explique l’interdiction de sa consommation comme c’est le cas du vin.

Le statut originel de référence ici est le vin. On l’appelle : c’est à quoi on assimile. C’est l’évènement, l’entité traité par un texte ou un consensus définissant son statut. Le cas secondaire ici est le jus de raisin fermenté. C’est la chose qui ne fait l’objet ni d’un texte ni d’un consensus en définissant le statut et dont on veut expliquer le statut religieux.

Le jugement est l’interdiction. Ce qui signifie que le statut originel de référence reposant sur un texte ou un consensus et exprimant une interdiction ou autre chose est à étendre au cas secondaire qu’aucun argument ne permet de juger.

La cause commune réside dans l’aptitude à rendre ivre. Cette cause est définie comme étant la qualité apparente et détectable sur laquelle le législateur a fondé le statut originel de référence.

Cela dit, le prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) eut recours au raisonnement par analogie dans ses fatwas afin de l’expliquer et de l’apprendre aux gens. En voici des illustrations :

-Al-Bokhari (1852) a cité un hadith rapporté d’Ibn Abbas (P.A.a) selon lequel une femme de la tribu djouhayna se présenta un Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et lui dit :  Ma mère avait formulé le vœu de faire le pèlerinage mais n’a pu le faire jusqu’à sa mort. Puis-je le faire à sa place ? -  Oui, fais-le à sa place. Ne penses-tu pas devoir régler ses dettes si elle en avait ? La dette envers Allah mérite mieux d’être payée. 

-un hadith cité par Mouslim (1148) d’après Ibn Abbas (P.A.a) enseigne qu’une femme se présenta au Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) et dit : ma mère est morte alors qu’elle avait un mois de jeûne à rattraper ?- il dit : ne vois-tu pas que si elle avait laissé des dettes tu devrais les régler ?- oui, dit –elle. -Alors la dette envers Allah mérite mieux d’être réglée, conclut le Prophète.

On lit dans al-foussoul fil aoussol (4/48) :   Il en est le hadith d’Ibn Abbas selon lequel un homme se présenta au Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et lui dit : mon père a vieilli sans avoir fait le pèlerinage. Devrais-je le faire à sa place ? -  Ne penses-tu pas que tu aurais réglé ses dettes à sa place ? -  Si -  Alors, fais le pèlerinage pour lui.  il en est de même du hadith de la khathamite qui interrogea le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) en ces termes :

-  Certes, mon père est concerné par l’obligation d’accomplir le pèlerinage à La Mecque alors qu’il est devenu trop vieux donc incapable de se maintenir sur une monture. Puis-je faire le pèlerinage à sa place ? 

-  Si ton père avait une dette et que tu la règle, cela ne lui suffirait-il pas ? 

-  Oui, dit- elle 

- La dette envers Allah mérite mieux d’être réglée. 

Ibn Abbas a rapporté qu’un homme se présentaau Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) et lui dit :

-  Ma sœur avait formulé le vœu de faire le pèlerinage mais elle est morte. 

- Ne penses-tu pas que si elle avait laissé une dette tu la règlerais ? 

-  oui. 

- Réglez la dette due à Allah car Il mérite mieux que tout autre qu’on lui paye. 

Ces informations fondent le raisonnement par analogie et attirent l’attention sur la nécessité d’assimiler les choses assimilables. Il a été rapporté d’après Muhammad ibn al-Mounkadir que le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui)fut interrogé sur la possibilité d’étaler le rattrapage du jeûne des jours du Ramadan et il dit :

- Pensez-vous qu’un endetté pourrait régler ses dettes progressivement ? 

-  il n’y a aucun inconvénient 

-  Allah est plus digne de laisser passer. 

Il lui appliqua le raisonnement par analogie et lui montra les points de ressemblance entre les choses assimilées. Il en est encore le hadith d’Omar qui dit : « Excité, j’ai appliqué un baiser (à ma femme) alors que j’observais le jeûne… Puis j’ai dit :

- Ô Messager d’Allah ! J’ai fait un énorme gave aujourd’hui car j’ai embrassé ma femme alors que j’observais le jeûne. 

-  que penses-tu si tu te gargarisais tout en observant le jeûne ? 

-  Cela ne représenterait aucun inconvénient. 

-  Quoi alors ? 

Le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) lui appliqua un raisonnement par analogie et lui fit assimiler les choses et attira son attention sur ce qu’elles sont en commun.»

Quant aux applications modernes du raisonnement par analogie, en voici des illustrations : la comparaison des résultats de l’ADN aux conclusions des (anciens) experts en généalogie pour l’établissement de la filiation. L’organisation Islamique des Sciences médicales a soutenu au coursde son XIe colloque sur l’ingénierie héréditaire, la génétique humaine et la thérapeutique génétique, tenu au Kuweit du 23 au 25 Djoulada II 1419 correspondant au 13-15 octobre 1998 que : l’ADN constitue scientifiquement un moyen quasiment infaillible de vérifier la filiation biologique et l’identité personnelle, notamment en médecine légale. Elle est aussi fiable que les preuves irréfutables reconnues valables par la majorité des jurisconsultes et appliquées en dehors des peines légales. Cette prise de position a été appuyée par l’Académie Islamique de jurisprudencede la Ligue Islamique Mondiale lors de sa XVIIe session tenue à La Mecque du 21 ay 26 Chawwal 1421 H sous réserve de se conformer intégralement à ses conditions. Voici ce qu’elle dit dans ses recommandations :  Si le test ADN est fait dans le respect de toutes ses conditions et si on évite d’y commettre une erreur, ses résultats sont quasiment infaillibles en ce qui concerne l’établissementou l’exclusion de la paternité d’un enfant par rapport à son présumé géniteur. 

-Il en est le raisonnement par analogie comparant le prélèvement d’un échantillon du sang sur un jeûneur à la pose de ventouse pour évacuer du sang gâté comme nous l’avons expliqué dans la fatwaa n° 50406.

Allah le sait mieux.

Source: Islam Q&A