Lundi 22 Djoumada 2 1446 - 23 décembre 2024
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Les formes et statut du vrai tourisme selon l'Islam

Question

J’espère que vous me fournirez des informations intéressantes et complètes à propos du tourisme islamique. C’est -à- dire sur la nature du tourisme selon l’Islam. En d’autres termes, quels sont les critères du tourisme en Islam? Comment promouvoir un tourisme islamique? Comment faire d’un pays musulman une destination touristique? Quels seraient les projets du tourisme islamique? Merci beaucoup.

Texte de la réponse

Louange à Allah.

Linguistiquement, le terme siyaha est polysémique. Mais son usage conventionnel est restreint. Car il signifie voyager dans un pays pour se divertir, pour faire des découvertes, pour se livrer à des recherches fructueuses etc. et non pour gagner sa vie ou travailler ou s’installer. Voir al-Mu’djam al-wassit, 469.

Pour parler de la conception islamique du tourisme, il faut procéder à la division que voici:

Premièrement, la conception islamique du tourisme

L’islam est venu pour changer beaucoup de concepts pervertis qui meublaient les esprits limités des humains. Car il a voulu fonder les concepts sur de nobles idéaux et les meilleures valeurs et mœurs.

Certaines nations antéislamiques avaient du tourisme une conception impliquant la torture de soi même à travers des marches forcées et un harcèlement du corps pour le punir et le priver des ( plaisirs de ) la vie d’ici bas.

L’Islam a annulé cette conception négative et rétrograde du tourisme.

Selon Ibn Hani, Ahmad ibn Hanbal a été interrogé en ces termes: Qui préférez vous: un homme qui fait du tourisme ou celui qui reste sédentaire? – Il dit: Le tourisme (errance) n’a rien à voir avec l’Islam; ni les prophètes ni les saints ne le faisaient. Voit Talbis Ibliss, 340.

Commentant les propos de l’Imam Ahmad, le hanbalite, Ibn Radjab a dit: S’étaient livrés à l’errance des gens considérés comme de fervents dévots, bien que sans instruction. Certains d’entre eux y renoncèrent dès qu’ils ont su cela. Voir Fateh al-Bari d’Ibn Radjab, 1/56.

L’Islam a développé le concept tourisme et l’a lié à de grands objectifs et à de nobles fins. Citons en ceci:

1/ Donner une dimension cultuelle au tourisme dans la mesure où il a prescrit un voyage pour accomplir un des piliers de la religion, le pèlerinage qui se déroule en des mois bien connus. Il a encore institué la Oumra qui se fait autour de la maison d’Allah Très Haut durant toute l’année…Quand un homme se présenta au Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) pour lui demander de faire du tourisme dans son sens antique (entreprendre un voyage moniste pour mortifier l’âme.», le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) l’orienta vers l’objectif le plus noble du tourisme et lui dit: Certes, le tourisme des membres de ma communauté réside dans le combat dans le chemin d’Allah. (Rapporté par Abou Dawoud, 2486 et déclaré bon par al-Albani dans Sahihi Abou Dawoud. Dans sa Takhridj ahadith Ihyaa ulum ad-din, 2486, al-Iraqui juge la chaîne des rapporteurs du hadith bonne. Méditez sur la manière dont le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) établit un lien entre le voyage religieux recommandé et ce grand objectif et cette noble finalité.

2/ La conception islamique du tourisme établit encore un lien entre le tourisme (d’une part) et le savoir et les connaissances (d’autre part). Les plus grands voyages ont été organisés au début de l’Islam pour l’acquisition et la diffusion du savoir. C’est ce qui a conduit al-Khatib al-Baghdadi à écrire son célèbre ouvrage intitulé : Voyager à la recherche du hadith. Et il y a recensé ceux qui avaient voyagé pour recueillir un seul hadith. C’est aussi à ce propos que l’un des hommes de la génération suivant celle des Compagnons a dit à propos de cette parole du Transcendant et Très Haut: Ils sont ceux qui se repentent, qui adorent, qui louent, qui parcourent la terre (ou qui jeûnent), qui s’inclinent, qui se prosternent, qui commandent le convenable et interdisent le blâmable et qui observent les lois d’Allah… et fais bonne annonce aux croyants.  (Coran, 9: 112)

Selon Ikrima, as-siyaha désigne les chercheurs du savoir. (Rapporté par Ibn Abi Hatim dans son exégèse du Coran (7/429) Voir Fateh al-Qadir, 2/408. Mais l’explication correcte soutenue par la majorité des anciens est que le terme as-siyaha désigne les jeûneurs.

3/ Parmi les objectifs du tourisme islamique figure la méditation et le souvenir. On trouve dans le saint Coran à plusieurs endroits l’ordre de sillonner la terre. C’est ainsi que le Très Haut dit: Dis: “Parcourez la terre et regardez ce qu’il est advenu de ceux qui traitaient la vérité de mensonge”. (Coran, 6:11) et : Dis: “Parcourez la terre et voyez ce qu’il est advenu des criminels”. (Coran, 27:69)

Selon al-Qassimi (puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) : ce sont ceux qui fréquentent les (anciennes) habitations pour s’arrêter sur les ruines, afin de méditer, d’en tirer des leçons et pour obtenir d’autres avantages. Mahassin at-tawil, 16/225.

4/ Peut être le plus grand des objectifs du tourisme islamique consiste dans l’appel à Allah Très Haut et dans la transmission à l’humanité de la lumière révélée à notre prophète Muhammad (bénédiction et salut soient sur lui). Cette prédication est la fonction des messagers, des prophètes et de leurs compagnons (P.A.a) .C’est ainsi que les Compagnons de notre Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) se répandirent en différentes zones pour apprendre aux gens le bien et leur prêcher la vérité.

Nous espérons que le tourisme d’aujourd’hui s’approprie les objectifs du tourisme de jadis qui possédait de grands desseins et de nobles finalités.

5/ Notons enfin que la conception islamique du tourisme implique qu’on voyage pour méditer sur le caractère merveilleux de la création d’Allah Très Haut et sur la beauté de cet immense univers, de sorte que l’âme humaine y trouve une source de renforcement de sa foi en l’unicité d’Allah et y puise une assistance pour s’acquitter des obligations de la vie.

En effet, il est nécessaire de se divertir afin de pouvoir ensuite entreprendre les choses sérieuses. A ce propos, le Transcendant et Très Haut dit: Dis: “Parcourez la terre et voyez comment Il a commencé la création. Puis comment Allah crée la génération ultime. Car Allah est Omnipotent”.. (Coran, 29:20)

Deuxièmement, les critères du tourisme légal en Islam

Notre sage loi comporte beaucoup de dispositions qui règlement et orientent le tourisme de manière à le rendre apte à réaliser ses objectifs déjà mentionnés; des dispositions de nature à l’empêcher de devenir incontrôlable et partant une source de malheur et de méfaits pour la société.

Parmi ces dispositions figurent celles-ci:

1/ Interdiction de voyager dans le dessein d’effectuer une visite pieuse à un endroit autre que les Trois Mosquées. D’après Abou Hourayra (P.A.a) le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) dit:«L’on ne selle pas une monture pour se rendre ailleurs qu’aux Trois mosquées que sont: la mosquée sainte, la mosquée du Messager et la mosquée al-Aqsa (Jérusalem) (rapporté par al-Boukhari, 1132 et par Mouslim, 1397)

Ce hadith interdit de faire la publicité pour le soi-disant tourisme religieux ayant pour destination d’autres endroits que les Trois Mosquées. C’est le cas de ceux qui appellent à visiter des cimetières, des mausolées, en particulier celles qui font l’objet de la vénération des masses, de pratiques païennes et de péchés ruineux. Car il n’existe pas selon la Charia un lieu de culte plus important que les Trois Mosquées.

Abou Hourayra (P.A.a) dit: Je me rendis à Tor où je rencontrerai Kaab al-Ahbar et m’assis avec lui… Il ajouta de longs développements avant de préciser: «Je rencontrai aussi Basra ibn Abi Basra al-Ghifari et il me dit:

D’où viens tu?

Du Tor.

– « Si je t’avais rencontré avant ton départ, tu ne serais pas sorti, car j’ai entendu le Messager d’Allah (bénédiction et salut soient sur lui) dire: L’on n’utilise une monture pour se rendre à un endroit autre que les Trois Mosquées que sont la mosquée sainte, ma propre mosquée et la mosquée de Jérusalem (rapporté par Malick, 108 et par an-Nassai, 1430 et déclaré authentique par al-Albani dans Sahihi an-Nassai).

De ce fait, il n’est pas permis d’organiser un voyage vers un lieu sacré autre que les trois endroits. Ce qui ne signifie pas qu’il est interdit de visiter les mosquées des pays musulmans, car leur visite est légale et recommandée. Ce qui est interdit, c’est de ne voyager que dans ce dessein. Si on voyage pour un autre objectif et si on en profite pour effectuer la visite, il n’ y a aucun inconvénient à le faire. Bien plus, elle pourrait même devenir nécessaire pour l’accomplissement des prières quotidiennes ou celle du vendredi.

Il est encore plus interdit de voyager pour visiter les lieux saints des autres religions comme le Vatican ou les temples bouddhistes ou d’autres lieux de culte.

2/ Des arguments étayent l’interdiction absolue faite aux musulmans de faire du tourisme en pays mécréants pour ses effets négatifs sur la foi et les mœurs du musulman amené à se frotter à des nations qui ne se soucient ni de religion ni de bonnes mœurs.

Cette interdiction se justifie en l’absence d’un besoin tel la nécessité de se faire soigner ou de faire du commerce, etc. Et elle ne concerne que les déplacements de loisir et de distraction. Car Allah Très haut a donné aux musulmans de vastes pays- loué soit Il- et y a placé des merveilles de Sa création qui dispensent les musulmans de se rendre chez les mécréants.

Cheikh Salih al-Fawzan (puisse Allah le protéger) a dit: «Il n’est pas permis de voyager dans les pays mécréants, car cela comporte des risques pour la foi et les mœurs qui découlent du séjour au sein des mécréants… Si toutefois un objectif juste nécessite un tel voyage, s’il s’agit de se déplacer pour recevoir des soins non disponibles sur place ou de poursuivre des études non dispensées en pays musulmans ou de mener des activités commerciales, il s’agit alors d’objectifs justes qui permettent de voyager en pays mécréants, pourvu de maintenir l’observance des rites de l’Islam et vivre pleinement sa foi dans ces pays, de n’y séjourner que le temps nécessaire et de rentrer en pays musulmans.

Quant au voyage purement touristique, il n’est pas permis parce qu’il n’est pas nécessaire pour le musulman et ne lui permet de réaliser aucun intérêt comparable au préjudice et au risque auxquels il expose sa foi.» Voir al-Mountaqa min fatawa Cheikh al-Fawzan, 2, question n° 221.

3/ Nul doute que la Charia interdit le tourisme ayant pour destination des lieux de débauche où l’on consomme des boissons alcoolisées, se livre au libertinage et commet des actes de désobéissance. C’est comme les plages où l’on assiste à des scènes de nudité, des manifestations  de débauche et un étalage d’actes de perversion.

Il en est de même de tout voyage entrepris pour organiser des cérémonies (religieuses) innovées. Car il est demandé au musulman de s’éloigner des actes de désobéissance, donc de ne pas les commettre ou accompagner celui qui s’y livre.

Les ulémas de la Commission Permanente ont dit :   Il n’est pas permis de voyager vers les lieux de débauche au nom du tourisme. Car cela comporte des risques pour la foi et la moralité. Or la Charia vise à éradiquer toutes les causes du mal. 

Fatwa de la Commission Permanente, 26/332.

Que dire du tourisme qui favorise les péchés et la turpitude parce qu’organisé pour les encourager.

Les ulémas de la Commission Permanente ont di encore :  Si le tourisme implique la facilitation et la promotion des actes de désobéissance condamnables, il n’est pas permis à un musulman qui croit en Allah et au jour dernier de coopérer dans la désobéissance à Allah et dans la violation de Ses ordres. Quiconque abandonne une chose pour complaire à Allah, Celui-ci la lui remplace par une chose meilleure. 

Fatwa de la Commission Permanente, 26/224.

4/ Visiter les vestiges des peuples anciens et leurs lieux d’habitation

Si les anciens habitants de ces endroits y avaient subi un châtiment sous la forme d’un engloutissement par la terre ou une métamorphose ou une destruction à cause de leur reniement d’Allah le Transcendant, il n’est pas permis dans ce cas de se rendre à ces lieux pour le tourisme ou le repos.

Les ulémas de la Commission Permanente ont été interrogés en ces termes : «  A la ville de Bida, dans la région de Tabouk, existent des ruines anciennes et des habitations taillées dans des montagnes. On dit qu’elles avaient appartenu au peuple de Chouayb (paix sur lui). La question est la suivante : est il prouvé ou pas que ces habitations avaient appartenues à ce peuple ? Qu’en est il de la visite de ces lieux pour les découvrir et pour en faire un objet de méditation et une source d’inspiration ?

Ils ont répondu en ces termes : « Il est largement répandu chez les historiens que l’habitat du peuple de Madyan auquel le prophète Chouayb (paix sur lui) était envoyé se situe dans la partie nord de la péninsule arabique,zone abritant aujourd’hui la ville de Bida et ses alentours. Allah seul sait ce qu’il en est réellement. Si cela est vrai, il n’est pas permis de visiter ces lieux pour les découvrir. Car, quand le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) passa près de Hidjr, ancien habitat des Thamoud, il dit :  N’entrez pas dans les lieux d’habitation de ceux qui étaient injustes à l’égard d’eux-mêmes, si ce n’est en pleurant afin d’éviter de subir le même sort qu’eux.  Ensuite, il baissa la tête et pressa le pas jusqu’à la sortie de la vallée. » (Rapporté par al-Boukhari, 3200 et par Mouslim, 2980)

Ibn al-Qayyim (puisse Allah lui accorder Sa miséricorde), évoquant les avantages et dispositions tirés de l’invasion de Tabouk, dit: Il en est ceci: quand on passe près de l’habitat de gens qui avaient subi la colère divine et un châtiment, on ne doit n’y entrer ni y séjourner, mais plutôt presser le pas et se masquer avec son habit tout en se mettant à pleurer jusqu’à la sortie. C’est ainsi que le Prophète pressait le pas dans la vallée Muhassir située entre Mouzdalifa et Mina. Car c’est l’endroit où Allah détruit l’éléphant et ses compagnons. Zad al-Maad, 3/560.

Al-Hafiz ibn Hadjar dit dans son commentaire du hadith précédent: ce hadith s’applique à l’habitat des Thamoud et à celui de peuples pareils, même si les premiers sont les seuls à être mis en cause. Fateh al-Bari,6/380

Voir Madjmouat abhath hayati kibari ulamma’ ql-mqmlqkah al arabiyya as saoudiyyah, vol 3 intitulé hukm ihyaa diyaari thamoud. Voir encore la réponse donnée à la question n° 20894.

5/ Il n’est pas permis à une femme musulmane de voyager sans se faire accompagner d’un mahram (très proche parent). Les ulémas ont émis un avis lui interdisant de voyager sans mahram, même pour les pèlerinages mineur et majeur. Que dire alors du tourisme qui se fait souvent dans une ambiance marquée par le laxisme et la mixité interdite. Voir les réponses faites aux questions n° 3098 et 4523.

6/ organiser des voyages de tourisme au profit des mécréants vers les pays musulmans

C’est permis en principe. Et quand le touriste mécréant obtient un visa d’entrée pour se rendre à un pays musulman, l’on doit assurer sa sécurité jusqu’à son départ. Cependant en terre musulmane doit être conditionnée par le respect de la religion musulmane, des mœurs et de la culture musulmanes. Aussi ne peut il pas prêcher sa religion ni accuser l’Islam faussement. Il ne peut pas non plus sortir en public sans être habillé comme il sied en pays musulman et non selon la coutume en vigueur dans son propre pays où prévalent nudité et licence. Il ne faut pas encore qu’il soit un espion. Enfin, on ne doit pas permettre à un mécréant de visiter La Mecque et Médine.

Troisièmement, il n’est un secret pour personne que le tourisme actuel est marqué par des actes de désobéissance (envers Allah) par la turpitude et la violation des prescriptions divines sous la forme d’exhibitionnisme volontaire, de nudité, promue en des endroits bien connus, de promiscuité, de consommation de boissons alcoolisées, de propagande pour la débauche, d’assimilation aux mécréants, d’importation de leurs mœurs et habitudes, voire de leurs maladies malignes. A quoi s’ajoute le gaspillage de sommes énormes et une perte de temps et d’efforts, le tout placé sous la belle étiquette de  tourisme . C’est pour cela qu’au nom d’Allah le Transcendant nous rappelons à tout fidèle, qui s’accroche jalousement à sa religion à ses mœurs et à sa nation, la nécessité de na pas contribuer à la promotion de ce tourisme dégradé

Bien au contraire, il faut le combattre et lutter contre la culture qu’il véhicule. Que l’on reste fier de sa religion, de sa culture et de ses mœurs, car cette culture (d’origine) nous a protégé contre toutes sortes de corruption et nous a trouvé un vaste alternatif dans la création d’Allah Très Haut que constituent les pays musulmans conservateurs.

Allah le sait mieux.

Source: Islam Q&A