Louange à Allah.
Les droits du musulman envers son coreligionnaire sont nombreux ; certains sont des obligations individuelles qui incombent à chaque individu et dont l’abandon constitue un péché, tandis que d’autres sont des obligations communautaires, si elles sont accomplies par une partie des membres de la communauté, alors les autres en sont déchargés. D’autres droits sont des recommandations non obligatoires dont l’omission ne constitue pas un péché pour le musulman.
L’imam Al-Boukhari (1240) et Muslim (2162) ont rapporté d’après Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui) qui a dit : « J’ai entendu le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) dire : “Les droits du musulman envers le musulman sont au nombre de cinq : répondre au salut, visiter le malade, suivre le cortège funèbre, répondre à l’invitation et implorer la miséricorde (lui dire : Yarhamouka Allah) pour celui qui éternue.” »
La version de Muslim rapportée par Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui) affirme que le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « Les droits que tout musulman doit à son coreligionnaire sont au nombre de six. » On lui a dit : « Quels sont ces droits, ô Messager d’Allah ? » Il a dit : « Salue-le si tu le rencontres, répond à son invitation s’il t’invite, conseille-le quand il sollicite ton conseil, implore-lui miséricorde s’il éternue et loue Allah, rend-toi à son chevet s’il tombe malade et suit son cortège funèbre s’il décède. »
L’imam Ach-Chawkani (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) a dit : « Par ses propos “le droit du musulman” il entend parler de ce qu’il ne convient pas d’abandonner, ce qui est soit un devoir ou un acte fortement recommandé et qui est semblable au devoir qu’il ne convient pas d’abandonner. L’emploi de l’expression dans ce sens relève de l’usage d’une expression polysémique dans ses deux acceptions. En effet, le terme “Haqq” (droit) est usité parfois pour désigner le devoir comme l’affirme Ibn Al-A’rabi. Il est encore utilisé pour désigner ce qui est confirmé, ce qui est nécessaire, ce qui est vrai, etc. Selon Ibn Battal, le sens voulu ici est : la sacralité, et la compagnie. » Extrait de Naïl Al-Awtar (4/21).
1/ Rendre le salut est un devoir si le salué est une seule personne. S’il est adressé à un groupe, il suffit qu’un membre du groupe répond à la place des autres car c’est une obligation collective. Quant au fait de prendre l’initiative de saluer, c’est en principe une sunna (pratique recommandée). On lit dans l’encyclopédie du Fiqh (11/314) : « Prendre l’initiative de saluer est fortement recommandée en vertu de la parole du Prophète (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) : « Diffusez le salut parmi vous. » C’est un devoir que d’y répondre si le salut est adressé à une seule personne. S’il est adressé à un groupe, la réponse incombe à l’ensemble du groupe (obligation communautaire). Si l’un d’entre eux répond au salut, les autres en sont dispensé. S’ils répondent tous, ils auront accompli une obligation, qu’ils le fassent tous ensemble ou de manière successive. S’ils refusent tous de répondre, ils tombent tous dans le péché en vertu du hadith : « Les droits du musulman sur le musulman sont en nombre de cinq : répondre au salut… »
2/ Rendre visite au malade : c’est une obligation communautaire. Cheikh Ibn Outheïmine (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) a dit : « Rendre visite au malade est une obligation communautaire. » Extrait de Madjmou’ Fatawa wa Rassaïl Ibn Outheïmine (13/1085). Se référer à la réponse donnée à la question n° 71968.
3/ Participer aux funérailles est encore une obligation communautaire. Se référer à la réponse donnée à la question n° 67576.
4/ Répondre à l’invitation : Si c’est pour assister à une cérémonie de mariage, la majorité des ulémas soutient que c’est un devoir que d’y répondre à moins qu’on soit légalement excusé. Si ce n’est pas pour assister à une telle cérémonie, la majorité des ulémas soutient qu’il est recommandé d’y assister. Dans tous les cas, la réponse à l’invitation est soumise à des conditions. Pour les connaitre en détail, se référer à la réponse donnée à la question n° 22006.
5/ Implorer miséricorde à celui qui éternue (lui dire : Yarhamouka Allah) est l’objet d’une divergence de vues. On lit dans l’Encyclopédie du Fiqh (4/22) : « Cette prière est une sunna pour les Chafi’ites. C’est une obligation chez les hanafites et selon un avis des hanbalites. Les Malékites disent que c’est une obligation communautaire et c’est aussi l’avis adopté par les hanbalites. Il est rapporté dans Al-Bayan que l’avis le plus connu est qu’il s’agisse d’une obligation individuelle compte tenu de cet hadith qui dit : « Il est du devoir de chaque musulman qui l’entend de lui dire : “Yarhamouka Allah” (Puisse Allah vous accorder Sa miséricorde). »
Selon l’avis le plus crédible, c’est une obligation pour toute personne entendant quelqu’un éternuer et louer Allah (dire : Al Hamdou Lillah) de lui implorer miséricorde.
A ce propos l’imam Al-Boukhari (6223) a rapporté d’après Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui) que le Prophète (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « Certes, Allah aime l’éternuement et déteste le bâillement. Si l’un d’entre vous éternue et loue Allah, il sera du devoir de toute personne qui l’entend d’implorer miséricorde pour lui. »
L’imam Ibn Al-Qayyim (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) a dit : « On a déjà cité cet hadith d’Abou Houreïra dans lequel on lit : ” Si l’un d’entre vous éternue et loue Allah, il sera du devoir de tout musulman qui l’entend de lui dire : Yarhamouka Allah (Puisse Allah t’accorder Sa miséricorde). »
L’imam At-Tirmidhi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a classé le hadith de Anas (Qu’Allah soit satisfait de lui) sous la rubrique : [Chapitre sur le devoir de demander la miséricorde d’Allah pour celui qui éternue et loue Allah] ce qui signifie qu’il s’agit bien d’un devoir selon lui, et c’est l’avis juste, compte tenu des hadiths clairs et explicites allant dans le sens de son obligation sans qu’il y ait aucune contestation, et Allah sait mieux.
Parmi ces hadiths, figure celui d’Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui) déjà mentionné et son autre hadith dans lequel il dit : « Cinq choses incombent au musulman envers son coreligionnaire… » et que nous avons déjà cité.
Figure encore parmi ces hadiths celui de Salem ibn ‘Oubeïd (Qu’Allah soit satisfait de lui) dans lequel on lit : « Que celui qui est avec lui, lui dise : Yarhamouka Allah. ».
En fait partie encore, le hadith rapporté par At-Tirmidhi d’après Ali (Qu’Allah soit satisfait de lui) qui a dit : « Le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « Tout musulman doit à son coreligionnaire six choses conformément au bon usage : le saluer quand il le rencontre, répondre à son invitation, prier pour lui quand il éternue, se rendre à son chevet en cas de maladie, participer à ses funérailles quand il décède et aimer pour lui ce qu’on aime pour soi-même. » Il le qualifie de bon et qu’il est rapporté du Prophète (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) par plusieurs voies. Certains émettent des réserves à propos d’Al-Hareth Al-A’war (l’un des narrateurs de ce hadith).
D’autres hadiths relevant du même chapitre sont rapportés d’après Abou Houreïra, d’après Abou Ayyoub, d’après Al-Baraâ et d’après Abou Mass’oud (Qu’Allah soit satisfait d’eux).
Fait partie aussi de ces hadiths celui rapporté par At-Tirmidhi d’après Abou Ayyoub (Qu’Allah soit satisfait de lui) selon lequel le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « Si quelqu’un éternue, qu’il dise : “Al Hamdou Lillah (Allah soit loué)”, puis qu’il dise : “‘Ala Koulli hal (en tout état)”. Et que celui qui lui réponde dise : “Yarhamouka Allah (Puisse Allah t’accorder Sa miséricorde)” et que lui, lui réponde : “Yahdikoum Allah wa Yousslih Balakoum (Puisse Allah vous guider et améliore votre état)” ».
Voilà quatre types d’indices concernant l’obligation :
– Le premier est une affirmation claire qu’il est obligatoire de dire “Yarhamouka Allah“, ce qui ne peut être interprété d’aucune autre manière.
– Le deuxième consiste à en faire une obligation par l’utilisation du mot “Haqq“ (devoir).
– Le troisième consiste à en faire une obligation par l’emploi du prépositif “‘Ala (sur)” qui indique clairement l’obligation.
– Le quatrième consiste à donner l’ordre de le faire.
Nul doute qu’il est certifié l’existence de nombreuses obligations autres que ces quatre-là, et Allah le Très-Haut sait mieux. » Extrait de Hachiyat Ibn Al-Qayyim ‘Ala Sounanes Abi Dawoud (13/259).
Il a dit encore : « Il apparaît à travers cet hadith cité tout au début que dire “Yarhamouka Allah” à celui qui éternue est une obligation individuelle pour toute personne qui l’entend dire “Al Hamdou Lillah“, et il ne suffit pas qu’une seule personne, faisant partie d’un groupe, le fasse. C’est l’un des deux avis énoncés par les ulémas et qui est choisi par les imams Ibn Abi Zaïd et Abou Bakr ibn Al-Arabi (Puisse Allah leur accorder Sa miséricorde), tous deux malékites, et rien ne s’y oppose. » Extrait de Zad Al-Ma’ad (2/437).
6/ S’agissant de donner un conseil à celui qui le demande, le plus apparent est que c’est une obligation communautaire. L’imam Ibn Mouflih (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) a dit : « Le sens apparent des propos de l’imam Ahmed (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) et ses compagnons est que c’est une obligation de donner conseil au musulman même s’il ne le demande pas, c’est ce qui est indiqué par le sens apparent des hadiths rapportés. » Extrait de Al-Adab Ach-Char’iya de l’imam Ibn Mouflih (1/307).
L’imam Al-Moulla Ali Al-Qari (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit : « “S’il te demande un conseil” signifie : s’il sollicite le conseil auprès de toi, “donne lui conseil” obligatoirement. Il est de son devoir aussi de lui donner conseil même si l’autre ne les sollicite pas. » Extrait de Mirqat Al-Mafatih (5/213).
L’imam Al-Hafedh ibn Hadjar (Puisse Allah lui accorder sa miséricorde) a dit : « Il est clair que le terme “Haqq” signifie l’obligation, contrairement aux propos d’Ibn Battal selon lesquels le terme “Haqq“ signifie “sacralité et compagnie”. Il parait que ce qui est visé ici c’est l’obligation communautaire. » Extrait de Fath Al-Bari (3/113).
Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.