Samedi 8 Djoumada 1 1446 - 9 novembre 2024
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Le verdict de l’avilissement envers son directeur

Question

Etudiant, je cherche des gains licites pour assurer mes propres dépenses et pour aider ma famille, dans la mesure du possible. Le seul obstacle devant moi est que j’ai du mal à m’abaisser  devant beaucoup de gens à commencer par le patron.

Ma question est celle-ci: se montrer humble  devant un autre qu’Allah n’est-il un acte de de désobéissance envers Lui? Cet abaissement de soi entraîne -t-il l’illéciété des gains obtenus? Comment éradiquer cet abaissement devant le patron en particulier et devant les gens en général? Vous feriez bien de me conseiller la lecture d’un livre car j’aime à lire.

Texte de la réponse

Louange à Allah.

A l’origine, exercer un travail ou une fonction est licite et permis et cela n’est aucunement un acte de désobéissance sauf s’il y a une preuve qui implique l’interdiction de l’activité concernée.

Cheikh Al-Islam Ibn Taïmiyya (Puisse Allah le Très-Haut lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Les propos et les actes des serviteurs d’Allah sont de deux types : des actes de culte qui consolident leur engagement envers leur religion, et des habitudes dont ils en ont besoin dans leur vie profane.

L’examen méticuleux des fondements de la Charia nous a permis de savoir que les pratiques cultuelles prescrites ou aimées par Allah sont attestées par une prescription légale. Alors que les habitudes sont à l’origine permises, on en interdit que ce que la Charia a interdit. Autrement, nous serions concernés par ce verset du Coran : « Que dites-vous de ce qu'Allah a fait descendre pour vous comme subsistance et dont vous avez alors fait des choses licites et des choses interdites ? Dis : « Est-ce Allah qui vous l'a permis ? Ou bien forgez-vous (des mensonges) contre Allah ? » (Coran : 10/59).

C’est pourquoi Allah a condamné les associâtres qui ont établi des lois religieuses qu’Allah n’a pas permis et ont prohibé des interdictions qu’Il n’a pas interdites. Voilà une règle importante et utile. » Extrait de Madjmou’ Al-Fatawa (29/16-18).

Le sentiment d’humiliation que vous éprouvez est souvent confondu avec quatre conduites ou comportements que les gens adoptent habituellement entre eux.

Le premier : La modestie.

Se montrer humble avec les musulmans est globalement recommandé et la Charia y exhorte les croyants. C’est dans ce sens qu’Allah, le Très-Haut, dit : « Ô les croyants ! Quiconque parmi vous apostasie de sa religion… Allah va faire venir un peuple qu'Il aime et qui L'aime, modeste envers les croyants et fier et puissant envers les mécréants, qui lutte dans la voie d'Allah, ne craignant le blâme d'aucun blâmeur. Telle est la Grâce d'Allah. Il la donne à qui Il veut. Allah est Immense et Omniscient. » (Coran : 5/54).

Se montrer humble et modeste c’est faire preuve d’indulgence, traiter les autres avec aisance, ne pas afficher de l’orgueil comme on le comprend d’une explication donnée dans un autre verset : « Mohammed est le Messager d'Allah. Et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, miséricordieux entre eux… » (Coran : 49/29)

D’après Abdallah Ibn Messaoud (Qu’Allah soit satisfait de lui), le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : « Ne vous informerai-je pas au sujet de celui qui sera interdit au Feu de l’Enfer ? Ou de celui à qui le feu de l’Enfer sera interdit ? C’est toute personne affable, douce et conciliante. » (Rapporté par At-Tirmidhi (2488) et qualifié par lui de bon et étrange, et jugé authentique par Al-Albani dans As-Silsila As-Sahiha (2/611).

Le deuxième : La peur.

La peur que le travailleur éprouve envers son patron pouvant le licencier ou effectuer une retenue sur son salaire. C’est une sorte de peur qu’on éprouve habituellement à l’égard de certains par rapport au pouvoir qu’Allah, le Très-Haut, leur a donné. Ce sentiment n’est pas interdit et ne représente pas une désobéissance à Allah, mais il empêche d’atteindre le rang idéal de la confiance totale en Allah le Très-Haut.

Le troisième : La pudeur.

Traiter les gens pudiquement fait partie des implications de la foi. Sous ce rapport, Abdallah Ibn Omar (Qu’Allah soit satisfait de lui et de son père) a dit : « Le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) est passé auprès d’un homme des Ansars qui sermonnait son frère à cause de sa pudeur …Le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : “Laisse-le, la pudeur fait partie intégrante de la foi.” » (Rapporté par Al-Boukhari : 24 et par Muslim : 36).

L’imam An-Nawawi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Sa parole "sermonner son frère à cause de sa pudeur" signifie qu’il lui proscrivait sa pudeur, la lui reprochait et l’en dissuadait, chose que le Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) lui a interdit en disant : “Laisse-le, la pudeur fait partie intégrante de la foi.” c’est à dire laisse-le demeurer dans son éthique de pudeur et arrête de la lui prohiber. » Extrait de Charh Sahih Muslim (2/6).

Le quatrième : L’obéissance.

L’obéissance à l’employeur conformément aux dispositions du contrat d’engagement est nécessaire. A ce propos, Allah le Très-Haut dit : « Ô vous qui croyez ! Remplissez fidèlement vos engagements. » (Coran : 5/1).

Cette obéissance concerne l’intérêt du travail mais elle n’est pas incluse dans le contrat de recrutement.

Cette obéissance est recommandée si elle concerne des activités faciles qui ne causent pas de préjudice pour le travailleur.

D’après Djaber Ibn Abdallah (Qu’Allah soit satisfait de lui et de son père) le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : « Qu'Allah fasse miséricorde à un homme conciliant lorsqu’il vend, lorsqu’il achète et lorsqu’il réclame son dû. » (Rapporté par Al-Boukhari : 2076).

L’imam Al-Hafedh Ibn Hadjar (Puisse Allah le Très-Haut lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Dans ce Hadith, on prône la tolérance dans le traitement des gens en faisant preuve d’une noblesse de caractère qui fait transcender les différends. » Extrait de Fath Al-Bari (4/307).

En somme, quand un musulman tient compte des considérations que voilà dans son comportement avec son employeur et les autres gens, il aura la paix ou sera récompensé à condition toutefois que ce comportement n’implique pas l’approbation ou la complicité dans les pratiques prohibées ainsi que la participation dans leur perpétration ou de les commettre. En effet, Allah le Très-Haut dit : « Entraidez-vous dans l'accomplissement d’Al-Birr et At-Taqwa (des bonnes œuvres et de la piété) et ne vous entraidez pas dans le péché et la transgression. Et craignez Allah, car Allah est, certes, dur en punition. » (Coran : 5/2).

Les actes interdits sont exclus du champ de l’humilité, de la pudeur et de l’obéissance.

D’après Ali (Qu’Allah soit satisfait de lui) le Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : Il n’y a point d’obéissance dans l’ordre de commettre un péché, l’obéissance est uniquement dans ce qui est convenable. » (Rapporté par Al-Boukhari (7257) et par Muslim (1840) et rapporté par l’imam Ahmed dans Al-Mousnad (2/318) en ces termes : « Pas d’obéissance à un être humain si c’est une désobéissance à Allah. »

De même, la seule peur de l’employeur n’est pas une excuse pour la perpétration d’un interdit religieux. Au contraire, on doit condamner un tel acte dans la mesure du possible et en prenant en considération l’intérêt d’un tel acte afin de se conformer à la parole du Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) : « Que celui d’entre vous qui constate un acte condamnable qu’il le change par sa main. S’il ne le peut pas, qu’il le fasse verbalement. S’il ne peut pas, qu’il le désapprouve par son cœur, et c’est le degré le plus faible de la foi. » (Rapporté par Muslim : 49).

Il ne faut pas confondre ces formes de conduite avec les gens, avec l’acceptation d’une quelconque forme d’humiliation. En effet, un croyant ne se laisse pas humilier.

L’imam Ibrahim An-Nakha’ï (Puisse Allah le Très-Haut lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Ils (les ancêtres pieux) refusaient de se faire humilier. Mais lorsqu’ils se trouvaient en position de force, ils privilégiaient le pardon. » (Rapporté par Al-Boukhari dans son Sahih sous une forme Mou’allaq) Fath Al-Bari (5/99).

En somme, si vous exercez un travail licite, que vous n’approuvez, ni ne contribuez à un acte de désobéissance et que vous ne vous laissez pas humilier, il n’y a apparemment pas d’inconvénient à ce que vous perdurez dans votre travail. Il est à craindre que votre sentiment d’abaissement face au patron résulte d’une obsession satanique visant à vous détourner de vos intérêts. La seule voie à suivre est de solliciter l’assistance divine et de vous engager résolument dans les activités licites que vous jugez profitables.

D’après Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui), le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : « Le croyant fort est meilleur et plus aimé d'Allah que le croyant faible, et en chacun d'eux il y a du bien. Veille à ce qui t'est utile, sollicite l'aide d'Allah et ne fléchit pas. » (Rapporté par Muslim : 2664).

Si votre question concerne la timidité excessive, nous vous conseillons de lire le livre intitulé Fiqh Al-Hayaa (la compréhension de la pudeur) par Cheikh Ismail Al-Mouqaddam.

 Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.

Source: Islam Q&A