Louange à Allah.
Premièrement :
Le critère qui régit At-Tachrik (Nourrir l’intention de plusieurs actes cultuels en un seul acte) entre les cultes en une seule intention est que l’un des cultes ne soit pas visé en lui-même mais il s’interpénètre avec d’autres par l’intention. Ceci s’applique au jeûne et à d’autres cultes.
Concernant le jeûne : le jeûne visé en lui même (nécessitant une intention qui lui est propre) comme le jeûne du Ramadan, le jeûne de rattrapage, le jeûne consécutif à un vœu, et le jeûne de jours particuliers comme la journée de Arafa, le jour de ‘Achoura, et le jeûne du lundi, en dépit de la divergence de vues concernant une partie des jours que voilà, quant à savoir si on les jeûne pour eux-mêmes ou non ?
Quant au jeûne qui n’est pas visé en lui même c’est celui accompli pour observer une recommandation, sans tenir compte de la particularité du jour, comme le fait de jeûner trois jours de chaque mois.
Ainsi il est permis de faire At-Tachrik dans l’intention entre le jeune du jour de ‘Arafa ou le jeûne du lundi avec le jeûne de l’un de ces trois jours (du mois).
On lit dans l’Encyclopédie du Fiqh (12/24) : « Lorsqu’on fait At-Tachrik entre deux actes cultuels avec la même intention, et qu’il y a une interpénétration entre les deux cultes comme Ghusl-Al Djanaba (pour se purifier d’un état d’impureté majeure) et le Ghusl de la prière du Vendredi, ou Ghusl Al-Djanaba et celui pour se purifier des menstruations ou encore le Ghusl du Vendredi et celui de l’Aïd. C’est encore comme At-Tachrik entre un culte qui n’est pas visé en soi comme la prière faite pour saluer la mosquée avec une prière obligatoire ou une autre prière surérogatoire. Tout cela ne remet pas en cause l’acte cultuel car la purification est établie sur l’interpénétration des cultes. De même; la prière du salut de la mosquée n’est pas visée en elle-même, mais ce qui est visé c’est d’occuper l’endroit par la prière, et de là elle peut être incluse dans un autre culte .
Mais At-Tachrik entre deux cultes dont chacun des deux est visé en soi (c’est-à-dire chacun nécessite une intention qui lui est propre) n’est pas valide comme le fait d’associer dans la même intention la prière du Dhohr et sa prière Ratiba (prière surérogatoire rattachée à l’obligatoire) car ce sont deux cultes indépendants l’un de l’autre et chaque prière ne peut être intégrée à l’autre. »
Docteur Souleïmane Al-Achqar (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit : « Celui qui dit que deux actes cultuels peuvent être faits en un seul acte avec la même intention, le dit parce que la volonté du Législateur se réalise par l’acte ainsi accompli. La prière faite pour saluer la mosquée est réalisée quand on accomplit la prière obligatoire, que le serviteur en nourrisse l’intention ou pas car ce qui est visé c’est d’occuper l’endroit par un acte cultuel. » Extrait de Maqassid Al-Moukallafine (p.255).
Cheikh Ibn Outheïmine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a été interrogé en ces termes : « Nous est-il permis de nourrir en même temps l’intention d’intégrer plusieurs actes cultuels dans un seul. Par exemple si on entre dans une mosquée au moment où l’on lance l’appel à la prière du Dhohr, peut-on faire une prière de deux Rak’ates avec l’intention qu’elle soit en même temps la prière du salut de la mosquée, la prière de la Sunna des ablutions et la prière Ratiba du Dhohr ?
Voici la réponse de son éminence : « Il y a là une importante règle qui est : "Est-ce que les actes cultuels s’interpénètrent ? ". Nous disons que si un culte dépend d’un autre, on ne peut pas les interpénétrer. C’est une règle !
Elle s’illustre à travers cet exemple : la prière d’Al-Fadjr (obligatoire) consiste en deux Raka’ates, sa Sunna est une prière de deux autres Raka’ates. C’est une Sunna indépendante mais elle est tributaire de l’obligatoire en ce sens qu’elle est une Ratiba de la prière d’Al-Fadjr, la complétant. La prière Sunna ne peut se substituer à la prière obligatoire et vice versa, car la Ratiba est tributaire de l’obligatoire, or quand un acte cultuel est subordonné à un autre, il ne peut le substituer. Ceci est valable pour chacun des deux cultes (l’obligatoire et sa Sunna).
Voici un autre exemple : la prière du Vendredi a une prière Ratiba qui la suit faite de deux Raka’ates . Peut-on se passer de la Ratiba pour avoir accompli la prière du Vendredi ? La réponse est non. Pourquoi ? Parce que la Ratiba de la prière du Vendredi lui est tributaire.
Deuxièmement : Si les deux cultes sont indépendants l’un de l’autre et si chacun est visé pour soi, ils ne peuvent pas s’interpénétrer.
Voici un exemple : Quelqu’un dit : je vais faire une prière de deux Raka’ates avant la prière du Dhohr avec l’intention qu’elles comptent pour quatre Raka’ates car la Ratiba qui précède celle du Dhohr comporte quatre Raka’ates effectuées avec deux saluts. S’il dit : je vais accomplir deux Raka’ates avec l’intention qu’elles comptent pour quatre, cela n’est pas permis. Car les deux actes cultuels sont indépendants l’un de l’autre et chacun est visé en soi et aucun d’eux ne peut se substituer à l’autre.
Voici un autre exemple : Il y a une prière surérogatoire à faire après celle d’Al-’Icha , après quoi on procède à la prière d’Al-Witr. Pour ce faire, on peut accomplir la prière d’Al-Witr trois Raka’ates ponctuées par deux saluts : on accomplit deux Raka’ates suivies d’un salut, puis une seule Rak’aa (Al-Witr). Si quelqu’un dit : moi je vais interpénétrer la Ratiba d’Al-’Icha avec celle d’Ach-Chaf’ et d’Al-Witr (tout cela en une seule prière de deux Raka’ates), cela n’est pas permis car chaque prière est indépendante et visée pour elle-même.
Troisièmement : si l’un des deux actes n’est pas visé en soi et ce qui est visé c’est faire ce type d’acte cultuel, là, l’un des deux actes peut se substituer à l’autre mais on se suffit du culte principal par rapport au culte secondaire.
Voici un autre exemple : Quand un homme arrive à la mosquée avant de faire la prière d’Al-Fadjr mais après l’Adhan, deux choses lui sont demandées : la prière de salut de la mosquée, acte qui n’est pas visé en soi car il s’agit de ne pas s’asseoir avant de faire une prière de deux Raka’ates. Si l’intéressé accomplit les deux Raka’ates (Ratiba) d’Al-Fadjr, il ne s’est pas donc assis avant de faire une prière de deux Raka’ates et a fait ce qui est visé. S’il n’a nourri que l’intention d’accomplir la prière de salut de la mosquée, les deux Raka’ates accomplies ne se substituent pas à la prière Ratiba d’Al-Fadjr car cette dernière est visée en soi, contrairement à la prière de salut de la mosquée.
S’agissant de la question de l’auteur : Si quelqu’un entre à une mosquée au moment où l’on lance l’appel à la prière du Dhohr, peut-il faire une prière de deux Raka’ates avec l’intention qu’elle soit en même temps la prière de salut de la mosquée, la prière de la Sunna des ablutions et la prière Ratiba du Dhohr ?
S’il a l’intention que la même prière vaut pour saluer la mosquée et la Ratiba (avant la prière du Dhohr), cela est suffisant.
Quant aux deux Raka’ates à faire après les ablutions, il faudrait que nous examinions la parole du Messager (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) : « Quiconque fait ses ablutions comme je viens de les faire puis accomplit deux Raka’ates sans se distraire, aura ses péchés précédents pardonnés. » Entend-il par là qu’il faut accomplir deux Raka’ates après les ablutions ou que lorsque tu fais tes ablutions, alors accomplis deux Raka’ates ? Si le dernier sens est voulu, les deux Raka’ates sont visées en soi. Mais s’il veut dire que celui qui accomplit deux Raka’ates après les ablutions, de quelque manière qu’il les fasse, dans ce cas ces deux Raka’ates peuvent se substituer à celles à faire après les ablutions, à celles faites pour saluer la mosquée et à celles qui précèdent régulièrement la prière du Dhohr (Ratiba).
Il me semble - Et Allah sait mieux - que la parole du Messager (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) : « …puis accomplit de deux Raka’ates… » ne signifie pas qu’il faut faire deux Raka’ates visées en soi mais signifie deux Raka’ates (tout court) fussent-elles une prière obligatoire. Cela étant, nous disons à propos de l’exemple cité par l’auteur de la présente question : « Les deux Raka’ates suffisent pour substituer celles faites pour saluer la mosquée et celles surérogatoires de la prière du Dhohr ainsi que celles faites à la suite des ablutions.
Voici un autre exemple : Un homme fait le Ghusl pour se purifier de la souillure majeure (Djanaba), ce Ghusl peut-il suffire pour celui du Vendredi ?
S’il a l’intention, en faisant le Ghusl de la Djanaba, de faire aussi le Ghusl du Vendredi, cela lui suffira car le Messager (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « L’homme n’obtient que ce dont il a l’intention. »
Mais si son intention était de prendre le Ghusl pour se purifier de la souillure majeure, ce Ghusl suffit-il pour celui du vendredi (sans en avoir l’intention)? Là, nous raisonnons : si le Ghusl du vendredi est visé en soi ou s’il s’agit simplement de se purifier pour ce jour. Ce qui est visé, c’est de se purifier car le Messager (Bénédiction et salut d’Allah soient sur lui) a dit : « Si vous vous purifiez ce jour-ci (le vendredi). » Par conséquent, il est apparent que ce qui est visé par ce Ghusl est que l’homme soit propre le jour du vendredi. Ce qui peut être obtenu grâce au Ghusl de la Djanaba. Dès lors, la prise de ce Ghusl pour se purifier de la souillure majeure suffit au fidèle pour celui préconisé le vendredi, même s’il n’en formule pas l’intention. S’il le fait, la question est claire. » Extrait de Madjmou’ Fatawa wa Rassaïl Ibn Outheïmine (14/299-302).
Ce qui précède met à l’évidence que la maîtrise de la règle que voilà est du domaine de l’Idjtihad (réflexion personnelle) selon ce qui prévaut chez un érudit à la lumière des ressources textuelles et des fondements de la Charia, mais aussi de ce qui a été décidé quant à la nature originelle de l’acte cultuel ou sa dépendance d’un autre. C’est ce qui amène les ulémas hanafites à spécifier que l’interpénétration n’est appropriée qu’aux « moyens » des actes cultuels, c’est-à-dire leurs conditions comme pour la purification par exemple : il est approprié chez eux (hanafites) l’interpénétration dans les intentions affectant les moyens. Comme par exemple de nourrir l’intention que le Ghusl soit pour se purifier de la souillure majeure (Djanaba) et pour la prière du Vendredi.
Quant aux « desseins », qui sont les pratiques cultuelles [elles-mêmes] demandées, l’interpénétration n’y est pas adéquate. C’est comme si on a l’intention d’accomplir la prière obligatoire du moment et rattraper une prière ratée en accomplissant quatre Raka’ates. Ce n’est pas valide.
L’imam Ibn Radjab Al-Hanbali (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit: « Quand deux pratiques cultuelles de la même espèce coïncident en même temps et que l’une n’est pas faite à titre de rattrapage ou qu’elle soit subordonnée à l’autre dans le temps, alors leurs actes s’interpénètrent de sorte qu’un acte suffit pour les deux.
Il y a là deux cas de figure :
Le premier cas est qu’avec le même acte il obtient les deux cultes en même temps. Dans ce cas il est exigé qu’il nourrisse l’intention pour les deux, selon l’avis le plus connu. En voici un exemple : un individu dont les ablutions se sont annulées et a contracté une souillure majeure. Selon l’école hanbalite, il lui suffit de se purifier de la souillure majeure tout en ayant l’intention que cela vaut pour les deux. »
L’imam Ibn Radjab (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) s’est étendu sur la citation des cas qui en résultent pour les adapter aux règles de l’école hanbalite avant de poursuivre :
« Le deuxième cas est que l’intention d’accomplir l’un des deux actes le dispense de l’autre. Les exemples sont nombreux : si quelqu’un entre à la mosquée après le début de la prière obligatoire, il est dispensé de la prière faite pour saluer la mosquée.
Un autre exemple: quand celui qui accomplit la ‘Omra arrive à La Mecque, il s’engage dans le Tawaf de la ‘Omra et se passe du Tawaf Al-Qoudoum (circumambulation de l’arrivée). » Voir Qawa’id Ibn Radjab (1/242).
Les Fouqahas des différentes écoles ont des avis détaillés à propos de la détermination des cultes qu’il est approprié d’interpénétrer et ceux que l’on ne peut pas faire.
Voir à toutes fins utiles At-Tadakhoul wa Atharouhou fil Al-Ahkam Ach-Char’iyya de Dr Mohammed Khaled Mansour disponible sur le réseau (p. 63) et suivantes
Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.