Vendredi 21 Djoumada 1 1446 - 22 novembre 2024
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Dix conseils pour ceux qui ont perdu leur argent dans les sociétés d’investissement

Question

Quels conseils à donner à ceux qui ont perdu leur argent dans les sociétés d’investissement ?

Texte de la réponse

Louange à Allah.

1. Il convient au musulman de s’efforcer d’investir son argent dans un domaine licite qui n’est pas interdit et d’éviter les projets suspects.

2. Qu’il choisisse un partenaire fort et capable de gérer les fonds et d’en assurer la croissance en les investissant à la manière d’un expert bien averti de la volatilité du marché.

3. Le contrat d’investissement consistant en la Moudharaba doit être conforme à la Charia et exempt de conditions interdites et invalides.

Il n’est pas permis d’accepter un contrat qui garantit le capital ou une somme précise des bénéfices. Il faut aussi que le partage des bénéfices entre les partenaires soit déterminé selon un pourcentage connu d’avance…etc.

4. Le spéculateur investisseur doit craindre Allah, le Très-Haut, dans la gestion des fonds investis d’autrui. Il ne doit pas prendre l’argent d’un tiers alors qu’il n’est pas capable de le gérer. Qu’il n’accepte de personne des fonds tout en sachant qu’il risque de faire preuve de négligence dans leur investissement. Il doit se conformer aux conditions de la Moudharaba. S’il s’engage auprès d’un partenaire à investir des fonds dans un pays donné ou dans un domaine spécifique, il doit respecter son engagement. Il ne lui est pas permis d’arnaquer les gens et leur faire croire qu’il réalise des bénéfices alors qu’il ne le fait pas. C’est un pêché majeur que de donner les bénéfices aux anciens actionnaires qu’il a puisé dans les capitaux apportés par les nouveaux actionnaires, alors qu’il n’exerce aucune opération commerciale réelle susceptible de fructifier les fonds. Il n’est pas permis de séduire les gens avec des promesses de profits mensongères tout en sachant certainement qu’il n’exerce aucun commerce susceptible de produire de tels profits.

5- L’investisseur doit craindre Allah dans la gestion des fonds des autres. Cela passe par le recrutement d’un personnel financier et administratif qualifié et expérimenté, apte à fructifier les fonds reçus des gens.

En cas de pertes :

- Le spéculateur doit être assez honnête pour mettre les actionnaires au courant de ce qui se passe réellement.

- S’il a commis un dépassement ou une négligence, il doit garantir son manquement et en assumer la responsabilité en supportant la perte due à son manquement et sa négligence.

- Le propriétaire de fonds qui a subi une perte, doit accepter le Jugement et le Décret d’Allah et s’efforcer à atténuer son malheur, traiter ses effets et sauver ce qui peut l’être de son capital par tous les moyens licites et conformes à la Charia.

-L’agrément du Jugement et du Décret d’Allah évite au perdant la dépression et la démoralisation de sorte qu’il ne sombre pas dans la folie ou subisse un arrêt cardiaque ou se suicide comme cela arrive à ceux qui ne savent pas observer la patience. Il doit se souvenir des vérités que voici :

Les malheurs qui atteignent l’humain dans sa personne, ses biens ou sa famille ou frappe la société ne constituent pas un mal pur devant provoquer la panique. Au contraire, ils apportent du bien au croyant qui sait les amortir et les gérer, car :

  1. C’est un bien pour lui comme l’a indiqué le Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) qui a dit : « Qu’il est étonnant le sort du croyant ! Tout ce qui le concerne lui est bénéfique et cela n’appartient à personne d’autre qu’au croyant : si une abondance l'atteint, il se montre reconnaissant et c’est bien meilleur pour lui. Et si l’adversité l’atteint, il se montre patient, et c’est bien meilleur pour lui. » (Rapporté par Muslim : 2999).
  2. Il se peut que Allah ait voulu du bien pour lui. L’imam Al-Boukhari (5645) a rapporté d’après Abou Houreïra (Qu’Allah soit satisfait de lui) que le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : « Quand Allah veut du bien pour quelqu’un, il l’éprouve. »

L’imam Al-Hafedh ibn Hadjar (Puisse Allah lui accorder Sa Miséricorde) a dit : « Abou ‘Oubeïd Al-Harawi a dit : « Cela signifie qu’Il lui inflige des malheurs afin de l’en récompenser. »

C. Peut-être aussi que Allah l’aime. « Et lorsqu’Allah, Exalté soit-Il, aime des gens, Il les éprouve. Quiconque endure le décret d’Allah aura la patience en retour, et quiconque en est épouvanté aura la panique. » (Hadith rapporté par des narrateurs dignes de confiance.)

D’après Sakhbara (Qu’Allah soit satisfait de lui), le Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : « Celui qui est reconnaissant quand on lui donne, est endurant quand il est éprouvé, sollicite le pardon quand il se comporte injustement, et pardonne celui qui lui a causé du tort : ceux-là sont en sécurité et sont bien guidés. » Rapportée par At-Tabarani sur la base d’une bonne chaîne de rapporteurs. » Fin des propos d’Al-Hafedh.

D. Allah a bien expliqué dans Son livre la voie qui apaise le cœur et tranquillise la colère de l’âme. Elle passe par l’endurance et le retour à Allah [en disant : « Inna lillah wa Inna Ilaïhi Radji’oune (c’est à Allah que nous appartenons et c’est vers Lui que nous retournerons). »] Allah a fait dépendre d’une telle attitude l’octroi de la meilleure récompense de Sa part, et la rétribution par laquelle, Il accorde au croyant le grade du vrai endurant qui ne cherche que la rétribution divine. C’est une promesse d’Allah qu’Il tiendra puisqu’Il, Gloire lui soit rendue, dit : « Très certainement, Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim et de diminution de biens, de personnes et de fruits. Et fais la bonne annonce aux endurants, qui disent, quand un malheur les atteint : « Certes nous sommes à Allah, et c'est à Lui que nous retournerons. » Ceux-là reçoivent des bénédictions de leur Seigneur, ainsi que la miséricorde ; et ceux-là sont les biens guidés. » (Coran : 2/155-157).

E. L’imam Al-Qourtoubi (Puisse Allah lui accorder Sa Miséricorde) a dit : « Allah, le Puissant et Majestueux a fait, des termes qui expriment le retour vers Lui, à savoir le fait pour l’éprouvé de dire : « Inna lillah wa Inna Ilaïhi Radji’oune (Nous appartenons à Allah et c’est à Lui que nous retournerons) » un refuge pour l’affligé et un moyen de protection contre les tentations de satan. Cette protection l’empêche de faire plonger sa victime dans des obsessions et mauvaises pensées de sorte à troubler sa quiétude et divulguer ce qui est dans son tréfonds. On s’immunise à l’aide de ces mots concis qui réunissent les significations de bonté et de bénédiction car dire : « Nous appartenons à Allah » est une reconnaissance de son statut de serviteur d’Allah entièrement soumis à Lui et qui accepte tout ce qui vient de Lui. Car le Souverain gère Son royaume comme Il l’entend. Et dire : « Et c’est à Lui que nous retournerons. » revient à confirmer qu’Allah mettra fin à notre vie puis nous ressuscitera. Le jugement lui revient exclusivement dans la vie d’ici-bas et le retour dans l’au-delà. Il y a aussi une espérance en la récompense d’Allah.

Et parmi les effets bénéfiques anticipés de cette déclaration de retour à Allah, qui s’ajoutent à ce qui a été dit, ce qui a été rapporté d’Oum Salama (Qu’Allah soit satisfait d’elle) : « J’ai entendu le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) dire : « Tout musulman atteint d’un malheur et qui dit ce qu’Allah lui a ordonné de dire, à savoir : "Inna lillah wa Inna Ilaïhi Radji’oune. Allahoumma iïdjourni fi moussibati wa oukhloufni khaïrane minha" (Nous appartenons à Allah et c’est à Lui que nous retournerons. Ô Allah, récompense-moi pour mon malheur et compense-moi par ce qui est meilleur), Allah compensera sa perte par quelque chose de meilleur. »

F. Les malheurs expient les péchés selon un hadith rapporté par les imams Al-Boukhari et Muslim d’après Aïcha (Qu’Allah soit satisfait d’elle) qui a dit : « Le Messager d’Allah (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) a dit : " Chaque fois qu’un malheur frappe un musulman, Allah en fait le moyen d’expier ses mauvais actes, même si le malheur n’est qu’une piqûre d’épine. »

G. Ce qui est demandé c’est de faire preuve d’endurance dès les premiers moments de la réception d’une mauvaise nouvelle de l’effondrement d’une société d’investissement. Cette résilience nous protège contre les AVC, l’arrêt cardiaque et la dépression nerveuses. Sachant que la patience qui génère une récompense est celle qu’on affiche au premier choc. » comme l’indique cet hadith du Prophète (Bénédiction et salut d'Allah soient sur lui) : « Certes, la patience se manifeste lors du premier choc. » (Rapporté par Al-Boukhari : 1238 et par Muslim : 926).

L’imam An-Nawawi (Puisse Allah lui accorder Sa Miséricorde) a dit : « Cela signifie la patience parfaite qui fait mériter l’ample récompense promise, de par sa grande difficulté. »

H. Quand le fidèle gère dignement son malheur, il se transforme pour lui en un bonheur car Allah en a fait le moyen d’expier ses péchés et d’élever son grade.

Il arrive qu’Allah fasse d’une épreuve une source de bien même si elle est immense, comme il arrive pour certains d’être éprouvés par l’abondance des grâces.

I. Le musulman doit être convaincu que la perte de ses biens ne signifie pas qu’Allah a voulu l’humilier. Allah nous a informé que la richesse et la pauvreté sont toutes les deux des épreuves. C’est dans ce sens qu’Allah Le Transcendant dit : « Quant à l'homme, lorsque son Seigneur l'éprouve en l'honorant et en le comblant de bienfaits, il dit : " Mon Seigneur m'a honoré." Mais par contre, quand Il l'éprouve en lui restreignant sa subsistance, il dit : " Mon Seigneur m'a avili. " » (Coran : 89/15-16)

J. En cas de malheur, le musulman doit prendre exemple sur les pieux serviteurs d’Allah, qui avaient subi des épreuves. Sous ce rapport, Allah le Très-Haut dit à propos du soulagement dont il a fait bénéficier Ayoub (Paix soit sur lui) : « Notre miséricorde dont il a joui. » Autrement dit, nous l’avons débarrassé d’une souffrance et d’un mal qui est en lui en signe de clémence, de pitié et de bienfaisance à son égard mais aussi « en guise de rappel pour les dévots. ». Ce qui signifie que c’est un rappel adressé à tout fidèle éprouvé dans son corps, dans ses biens ou dans ses enfants. Il doit suivre l’exemple de Ayoub (Paix soit sur lui), Prophète d’Allah qui, bien qu’ayant subi la plus dure des épreuves, était demeuré patient pour complaire à Allah, le Très-Haut, qui l’a enfin soulagé.

Le calife Al-Walid ibn Abdelmalek a reçu un malvoyant issu de la tribu de Abse, qui est venu s’asseoir à ses côtés et Al-Walid l’interrogea sur son état. Il a répondu : « Ô émir des croyants ! Il m’est arrivé un moment où personne de la tribu de Abse n’était plus riche que moi en termes d’argent, de chevaux, de chameaux, personne d’entre eux n’avait d’enfants, d’alliés ou de prestige autant que moi. Plus tard, un torrent est venu emporter nos familles, nos biens et nos enfants et ne nous a laissé qu’un nouveau-né et un chamelon déchaîné. J’ai pris l’enfant et j’ai suivi le chamelon qui s’est échappé. Et comme je n’ai pas pu le rattraper, j’ai posé l’enfant au sol pour aller rattraper le chamelon. Courant derrière ce chamelon, j’ai entendu les cris du petit. Revenu vers lui, j’ai découvert qu’un loup l’avait dévoré. Alors je suis retourné au chamelon, et en essayant de le maîtriser, il m’a asséné un coup de patte au visage qui m’a terrassé sur le dos et m’a crevé les yeux. Quand j’ai repris mes esprits, je me suis rendu compte qu’hier soir j’étais l’un des gens les plus fortunés, j’avais des enfants, des bêtes, de l’argent, du prestige et d’une position élevée au sein des tributs, et du jour au lendemain, je suis devenu sans rien. En plus de la perte de ma vue, je n’avais plus ni enfants, ni famille, ni argent. Malgré cela, j’ai loué Allah pour tout cela. »

Al-Walid a dit : « Emmenez-le auprès de ‘Ourwa ibn Az-Zoubeïr (Puisse Allah lui accorder Sa Miséricorde) pour qu’il sache qu’il y a sur terre un homme plus éprouvé que lui et plus endurant et plus persévérant. »

Quand une épreuve te frappe, reste patient comme un homme digne car c’est plus sage.

Quand des soucis t’envahissent, reste silencieux, c’est plus sûr.

Ne te plaint pas aux gens car ainsi tu plaindrais le Miséricordieux à l’incompatissant.

Que d’épreuves sont en vérité un bien pour celui qui en est éprouvé ! Il se peut que la préférence pour un individu soit dans la pauvreté et la maladie, car s’il restait sain et jouissant de l’abondance des biens, il chuterait dans la tyrannie et l’ostentation : « Si Allah attribuait Ses dons avec largesse à [tous] Ses serviteurs, ils commettraient des abus sur la terre… » (Coran :42/27).

Oublie tes soucis et confie tes affaires au Destin.

Attends-toi à un bien prochain qui te fera oublier le dur passé.

Que de fois une chose exaspérante entraîne des conséquences agréables.

Il se peut que le détroit se rétrécit et il se peut que l’espace s’élargit.

Allah fait ce qu’Il veut, ne t’oppose pas à Lui. 

Allah t’a habitué à Ses grâces, alors réfère-toi au passé.

K. L’effondrement d’une société d’investissement ne signifie pas que l’actionnaire ne récupère rien de ses fonds. Au contraire, il se peut qu’il en retrouve la moitié ou plus ou moins. A supposer qu’il perde tout, ce ne serait pas la fin du monde ni le désespoir total car Allah peut lui octroyer d’autres fonds dans le futur à titre compensatoire, pourvu qu’il fasse preuve de patience.

6. Toute personne qui aurait menti en donnant de fausses informations, ou qui a fait croire à une contrevérité ou aurait eu recours à la dissimulation et la fraude, ou qui a reçu de l’argent à investir dans un domaine déterminé puis a trahi les actionnaires en le plaçant dans des sociétés au bord de l’effondrement afin de partager les bénéfices avec eux, une telle personne doit se repentir à Allah

Il en est de même de celui qui met en risque les fonds des autres ou les épargne de sa sœur ou de sa mère ou de son épouse sans expliquer aux concernées le vrai usage qu’il a fait de leurs biens, ainsi que toute personne qui fait un emprunt usurier pour s’engager dans ces sociétés d’investissement.

Il se peut que la découverte de ces réalités constitue une leçon importante et un motif de réflexion dont il faudra profiter.

7. Ceux qui auront donné des conseils et lancé des avertissements à propos de ces pratiques hasardeuses doivent éviter de se réjouir de la mésaventure des malheureux. Bien au contraire, ils doivent s’efforcer à employer tout moyen disponible pour atténuer leur malheur, les consoler et leur apporter toutes sortes d’assistance.

8. Certes, la religion musulmane et ses vrais adeptes qui la pratiquent n’assument en aucun cas les conséquences des pratiques entachées de mensonge, de tricherie, de dissimulation, de trahison, de mauvais agissements, de prise de risques mal calculés ou d’actes de gestion improvisés aboutissant à la dilapidation d’argent dans des opérations perdantes ou les en exposant au vol ou au détournement.

La responsabilité n’incombe qu’au fautif ainsi qu’au négligeant. Il n’est pas permis d’imputer aux autres les conséquences de notre imprudence et la responsabilité de notre mauvaise gestion, de nos mensonges ou tentatives de détournement. C’est dans ce sens qu’Allah, le Très-Haut, dit : « Or, personne ne portera le fardeau d'autrui... » (Coran : 35/18) et Il dit : « …Et quand vous parlez, soyez équitables… »  (Coran : 6/152) et Il dit : « …Pratiquez l’équité cela est plus proche de la piété. » (Coran : 5/8) et Il dit : « …Observez strictement la justice... » (Coran : 4/135).

9. En cas de perte, il faut emprunter la voie légale en distribuant équitablement l’argent disponible après la perte aux propriétaires du capital de sorte à ce que chacun en reçoive un pourcentage proportionnel à sa part du capital.

Il n’est pas permis que le marché du courtage interdit achète les dettes et les fonds non récupérés à un prix inférieur parce que cela revient à cumuler deux formes d’usure (Riba Al-Fadhl et Riba An-Nassiâa). Or l’usure demeure l’un des plus graves péchés capitaux.

10. Les musulmans doivent faire preuve de tolérance les uns envers les autres. Pour ce faire, ils doivent exclure dans leurs relations les insultes, les injures, la répudiation des épouses, la maltraitance des deux parents, la rupture des liens de parenté et les agressions.

Les musulmans nantis doivent contribuer dans la mesure du possible aux compensations à donner aux propriétaires des capitaux, parmi les pauvres, les faibles, les orphelins, les veuves, les vieilles personnes, les gens à revenu limité et ceux qui ont vendu leurs maisons et véhicules et ont mis fin à leur activité commerciale pour investir dans une opération ratée. Il faut aussi sauver ce qui peut l’être des fonds caritatifs placés injustement et outrancièrement dans des opérations de Moudharaba sans l’autorisation des bienfaiteurs et en l’absence de voix qui réclament leur restitution.

Les avocats musulmans doivent s’évertuer bénévolement à aider les faibles à recouvrer leurs droits. Il ne faut attendre la récompense que d’Allah en prouvant l’innocence des innocents, et en prodiguant conseils et consultance dans un but religieux.

Nous demandons à Allah d’accorder aux victimes une bonne compensation, de Sa part, de ce qu’ils ont subi, et qu’il leur accorde endurance pour ce qu’il leur est arrivé, Il est certes le Meilleur des dispensateurs.

Et Allah, le Très-Haut, sait mieux.

Source: Sheikh Muhammed Salih Al-Munajjid